Jean-Noël Humbert, directeur du Syndicat des sucres: «L’usage qu’on fait du passé… pour modeler le présent, c’est presque de la conspiration»

Jadis pilier de l’économie mauricienne, le secteur sucre s’est métamorphosé au fil des ans pour devenir une activité pointue. Responsable de la commercialisation et du marketing du sucre mauricien à l’étranger, le Syndicat des sucres, à travers la voix de son directeur Jean-Noël Humbert, évoque les défis auxquels ce secteur est toujours confronté. Et aussi les attentes par rapport au budget 2014.

Rappelons d’emblée que les compagnies sucrières et autres producteurs indépendants ne font pas eux-mêmes leur marketing. C’est en ce sens qu’ils ont décidé de confier ce travail au Syndicat des sucres et, par conséquent, de s’assurer à terme un marché qui soit soutenable. «Dans ce contexte, nous recevons des devises de la vente de nos sucres, principalement en euro et aussi en dollars. Nous avons la responsabilité d’aller sur le marché du Forex pour vendre ces devises au meilleur prix aux banques commerciales. C’est de cette manière que nous garantissons le paiement aux producteurs», explique Jean-Noël Humbert.

Faire face à la concurrence

Exposé au marché mondiale surtout depuis la fin du Protocole sucre, le secteur sucre fait désormais face à une concurrence accrue. La libéralisation du marché européen a accentué ce mouvement.«Nous avons plus de concurrence et d’autres exportateurs vers le marché européen», confie notre interlocuteur. C’est le cas des pays moins avancés qui bénéficient d’un accord spécial «Tout sauf les armes». A ne pas négliger non plus ces pays qui sont plus productifs que Maurice comme ceux dans la partie sud de l’Afrique. Parallèlement, d’autres marchés émergent comme ceux de l’Amérique du Sud, voire des pays distincts comme l’Inde.

«Pour notre part, nous souhaitons fidéliser nos acheteurs pour des sucres raffinés et par la qualité et la régularité de nos exportations… Notre stratégie pour faire face à l’avenir et à la concurrence, c’est 70% en sucre raffiné blanc exporté à quelque 200 industriels en Europe et 30% de la production sous forme de 16 variétés de sucres spéciaux vendus à une centaine de pays à travers le monde»,fait ressortir Jean-Noël Humbert pour qui il est important d’avoir un budget qui encourage la compétitivité et un port où nous pouvons envoyer nos produits en continu.

De nouvelles règles

Insuffler un autre dynamisme au secteur participe également d’un effort pour parvenir à une situation où les relations industrielles sont plus saines. «Au sein de l’industrie sucrière, il faudrait aller vers du collective bargaining (ndlr : négociations collectives) où les différentes parties pourraient se parler et s’entendre. Dans l’ensemble, nous avons une bonne image. Nous avons passé par l’exercice très compliqué et difficile de pouvoir qualifier un certain nombre de planteurs à Maurice pour l’étiquette Commerce équitable. Pour ce faire, ces producteurs ont eu à satisfaire trois normes. La première, c’est les normes environnementales. Deuxièmement, les normes de gouvernance. Et troisièmement le respect des normes sociales. Nous avons pu obtenir le label Fair Trade grâce au respect de ces trois normes», précise le directeur du Syndicat des sucres.

Il reste que l’effort est collectif et qu’il doit œuvrer vers un modèle qui intègre les impératifs du moment. Nous vivons dans un monde précaire. Mais, il y a des motifs d’espoir. «L’économie, c’est la somme totale des activités des hommes, des entrepreneurs, des investisseurs, de tous ceux qui veulent investir dans l’avenir, dans de nouvelles idées, des nouvelles formes de consommation…  Ce n’est pas souhaitable d’avoir un développement qui se passe de règles. On voit émerger, aujourd’hui, de nouvelles idées, de nouvelles éthiques. Le concept de développement durable est en train de s’installer, désormais, dans les esprits», conclut, en ce sens, Jean-Noël Humbert.