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Au shelter l’Oiseau du Paradis
Trois mineurs dans un «état second» hospitalisés, huit employés suspendus, un système en crise
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Au shelter l’Oiseau du Paradis
Trois mineurs dans un «état second» hospitalisés, huit employés suspendus, un système en crise

Les enfants font le mur fréquemment au shelter.
La Fédération des travailleurs unis crie à l’injustice.
«IL est inconcevable que ce soient les caregivers qui paient les pots cassés pour des faits dont ils ne sont ni maîtres ni responsables. La ministre fait fausse route. Ce n’est pas normal que de simples travailleurs portent le chapeau alors que le board du National Children’s Council (NCC) vient à peine d’être constitué. Des rapports dénonçant les conditions de travail dans ce shelter ainsi que la situation chaotique qui y règne ont été envoyés depuis des mois au ministère, sans suite. Nous réclamons depuis des années la privatisation du NCC, en vain…»
C’est le coup de gueule d’Atma Shanto, syndicaliste et négociateur de la Fédération des travailleurs unis (FTU), après l’annonce de la ministre de l’Égalité des genres et du Bien-être de la famille, Arianne Navarre-Marie, hier, sur la suspension de huit membres du personnel du foyer L’Oiseau du Paradis, à Cap-Malheureux. Il affirme avoir lui-même alerté les autorités il y a environ trois semaines.
La décision intervient après l’admission à l’hôpital SSRN de trois garçons – un de dix ans et deux de 13 ans – retrouvés dimanche soir dans un «état second». Selon nos informations, ils s’étaient de nouveau échappés du centre, comme ils le faisaient régulièrement depuis un mois, pour aller chercher leur «marchandise» à Résidence Gervaise. Ce soir-là, les caregivers, sous une pluie battante, ont lancé deux battues successives. Deux enfants ont été aperçus regagnant furtivement le centre par un terrain boisé, tandis que le troisième était déjà rentré.
Depuis septembre 2024, ces enfants voleraient de l’argent aux employés ou revend- raient leur goûter à l’école pour se procurer de la drogue ou errer dans les environs pour «d’autres raisons». Suite à la médiatisation de l’affaire, la ministre Arianne Navarre-Marie a exprimé sa colère. Elle a pointé du doigt le NCC, qu’elle accuse d’avoir traité ce dossier avec légèreté, et a indiqué que son ministère avait effectué deux visites sur place. Elle a aussi révélé que les enfants auraient dû être conduits à l’hôpital pour être soumis à une série de tests dès le vendredi 30 mai, mais que cela n’a pas été fait.«Et personne ne sait encore pourquoi.»
Elle a donc décidé de suspendre tous les employés de nuit concernés et a confié l’enquête interne à Daniel Labonne, secrétaire permanent. «À l’heure actuelle, nous n’avons pas encore reçu de rapport médical complet, mais d’après ce que nous savons, ces enfants étaient dans un état second dimanche soir. J’ai donc décidé, en consultation avec le Secrétaire permanent, de suspendre avec effet immédiat toutes les personnes qui travaillaient pendant le service concerné dimanche soir.»
D’ajouter : «Ena dimounn ki pa pe al dan mem sans ki nou pe travay. Zot pou bizin vinn explik zot konportman ek zot atitid dan sa komite danket-la. Nou pa kapav met an peril lavi zanfan», a affirmé la ministre. Elle s’est rendue au chevet des enfants hospitalisés, qui sont heureusement hors de danger. «La ministre a eu l’occasion de s’entretenir avec les trois enfants et ces derniers ont pu lui faire part de leur état d’âme par rapport à leur situation», nous dit-on.
«L’enquête déterminera les responsabilités des uns et des autres»
Dans le milieu concerné, la situation révolte. Travailleurs sociaux, syndicalistes et fonctionnaires dénoncent une injustice. Le shelter fonctionne sans directeur depuis plus d’un an, et les 22 mineurs sont uniquement sous la responsabilité de caregivers désemparés. Le board du NCC a été nommé il y a deux semaines, mais son président attend toujours sa lettre de confirmation.
Qu’en est-il des responsabilités du NCC et de la Child Development Unit (CDU) ? Selon la hiérarchie, les caregivers s’adressent aux Assistant Child Program Officers, qui envoient leurs rapports aux officiers du NCC, lesquels transmettent à la CDU. «L’enquête déterminera les responsabilités des uns et des autres», indique un préposé du ministère.
À la suite des deux visites ministérielles, plusieurs actions ont été entreprises : refonte des menus, installation d’armoires, réaménagement des espaces, nettoyage des cours pour retirer métaux et débris, célébration systématique des anniversaires des enfants. Le poste de shelter manager reste vacant, en attente de confirmation du board.
Selon le ministère, deux des trois mineurs hospitalisés ont été testés positifs à une substance illicite, sans qu’il ne s’agisse de drogue synthétique. Deux d’entre eux, suivis à l’hôpital Brown-Séquard, prennent des médicaments «assez forts» qui pourraient expliquer leur état. Le troisième, qui n’est pas sous traitement, n’a pas été testé positif.
Ce n’est pas la première fois que le shelter L’Oiseau du Paradis est sous les projecteurs. Fugueurs, bébés négligés, conditions de vie précaires : de nombreuses plaintes ont déjà été adressées aux autorités, sans changements notables à ce jour.
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