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Portrait

Stefano Zinno : La continuité dans le service à l’État italien

3 juin 2025, 17:00

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Stefano Zinno : La continuité dans le service à l’État italien

Stefano Zinno, d’assistant inspecteur de police à Venise à consul d’Italie à Maurice.

Stefano Zinno, le consul d’Italie à Maurice, est plus qu’un simple diplomate. Avant d’occuper ce poste de responsabilité, il a eu une carrière prestigieuse au sein dans la brigade antidrogue à Venise. Pour nombre d’opérations réussies, il a reçu des félicitations et des médailles, la plus importante étant Chevalier de la République d’Italie, l’équivalent de l’insigne de la Légion d’honneur française. Etre consul pour lui, c’est assurer la continuité du service à l’Etat italien, commencé à l’époque où il a intégré la police. Pour marquer, cette année, la fête nationale italienne, le 2 juin, Stefano Zinno publie un magazine, «ITALMAG», qui présente quelques-uns des entrepreneurs italiens installés à Maurice.

Cet Italien de 59 ans, qui a passé 28 ans à Maurice, est à l’aise partout. «Je m’adapte à toutes les situations.» Originaire de Mestre, il est le cadet de deux enfants. Ses parents, Luigi et Maria Grazia Zinno, tiennent une boutique de vêtements. Il est aussi très proche de ses grands-parents maternels, notamment de son grand-père, Armando Oselladore, qui est son modèle. Sur ses conseils, Stefano Zinno intègre l’école technique Volta, à Mestre, et suit une formation électrotechnique. Le sport, en particulier le football, occupe une grande place dans sa vie et il joue dans une équipe régionale de Mestre.

Il porte en lui un rêve d’enfant, celui de devenir policier. Cette idée ne le quitte pas. Lorsqu’il complète sa formation électrotechnique, il se présente au concours d’entrée de la police nationale. Concours étalé sur quatre jours et qui est difficile car pour 1 200 places disponibles, les postulants sont des milliers. Il réussit toutes les épreuves et son autre atout est qu’il est footballeur. Ça tombe bien car la police a une équipe de foot.

🔵 Homme d’action et de terrain

Recruté, la première année, on l’envoie dans une unité paramilitaire. Confirmé, il passe une deuxième année dans cette unité avant d’être envoyé en Sicile, à 1 200 km de chez lui. Mais le travail de bureau lui plaît moyennement. Lui, ce qu’il veut, c’est être dans la brigade anti-drogue, travailler en civil sous couverture, traquer des trafiquants et autres criminels, «faire un vrai métier d’enquêteur».

Il figure parmi les policiers retenus pour escorter le juge Giovani Falcone, qui traque la mafia sicilienne, la Cosa Nostra, et qui est assassiné, le 23 mai 1992, à Capaci en Sicile. Ce jour-là, Stefano Zinno ne travaille pas mais un de ses amis escorte y laisse la vie. Cet épisode tragique le motive à davantage lutter contre le système mafieux.

Il demande sa réaffectation dans un commissariat plus proche de Mestre et il est envoyé à celui de Venise. Comme Stefano Zinno n’est pas homme à rester assis derrière un bureau à rédiger des rapports, au bout d’un an, il demande à être muté à la brigade criminelle, qui comprend plusieurs sections dont l’unité anti-drogue. Il est aux anges quand son vœu est exaucé. Il est non seulement en civil mais aussi sur le terrain à filer et arrêter des trafiquants de drogue, des braqueurs, des pédophiles, des criminels à col blanc, etc. «J’ai participé à plusieurs enquêtes sur la ‘Mafia del Brenta’, la mafia du nord de l’Italie. Mon équipe et moi avons reçu plusieurs récompenses et de nombreuses décorations.»

Il n’a jamais eu peur lorsqu’il était en mission. «Quand vous allez faire une opération, vous avez tellement les yeux rivés sur votre objectif et sur la préparation que vous ne craignez rien. C’est après avoir arrêté les bandits que vous vous rendez compte que ça aurait pu mal tourner.» Il a déjà été blessé lors d’accidents résultant de coursespoursuites, mais c’était sans gravité.

De toutes les affaires que lui et son équipe ont résolues, il n’oublie pas l’arrestation d’un pédophile, qui avait enlevé une fillette de quatre ans et qu’ils ont ramenée saine et sauve. «Il y a trois-quatre ans, une femme m’a contacté sur les réseaux sociaux. Son nom me disait bien quelque chose mais cela ne me revenait pas. Elle m’a remercié en me disant qu’elle était la gamine que j’avais délivrée des griffes du pédophile en question. C’était très émouvant et gratifiant car on réalise qu’on a vraiment pu aider une personne.»

Lorsqu’il se marie et devient père de famille, il prend conscience que ses enfants risquent de grandir sans lui «car vous savez à quelle heure vous quittez la maison le matin mais vous ne savez jamais à quelle heure vous rentrez et si ce sera sur les deux pieds ou les pieds devant». Et puis, précise-t-il, la géopolitique et la migration de personnes des pays des Balkans vers l’Italie ont changé la donne. «Avant les années 90, il y avait un certain code d’honneur entre les policiers et les bandits, une certaine forme de respect. Mais avec cette migration, il n’y avait plus de règle. Un policier pouvait se faire abattre pour un rien.»

🔵 Renouer avec le tennis

Lui et sa famille viennent s’installer à Maurice. Une décision pas facile à prendre car ses coéquipiers étaient sa deuxième famille. Mais sa décision est mûrement réfléchie. Une fois à Maurice, il change totalement de domaine. Il achète un bateau de pêche au gros qu’il nomme Elisa et fait sortir des touristes dans l’Ouest et le Nord.

Comme il a tous ses brevets de plongeur professionnel, il travaille aussi avec son ami, Roy Erasmus, et les deux effectuent de gros travaux, souvent sous-marins. Comme passe-temps, il met en place une école de foot pour les enfants au Racing Club de Maurice et renoue aussi avec le tennis. Il fait une demande de licence auprès de la Fédération mauricienne de tennis et lorsque cette fédération offre le cours menant à un Brevet d’État de cadre sportif (BECS) en tennis,

Stefano Zinno, qui veut devenir coach, suit cette formation et obtient son BECS. À ce jour, il a entraîné des centaines de jeunes. Il est actuellement vice-président de la fédération de tennis. Stefano Zinno a obtenu sa nationalité mauricienne au début des années 2000. Il se sent aussi bien Italien que Mauricien. En 2005, lorsque le consul italien Giovani Gamba se retire, le gouvernement italien, conscient de son passé de fonctionnaire exemplaire, lui offre le poste. Il l’accepte car, pour lui, c’est la continuité du service à l’État italien, commencé lorsqu’il est entré dans la police. «C’est le fait de croire en son pays, de vouloir le servir et de porter haut son drapeau.» Trois ans plus tard, en signe de reconnaissance pour les services rendus à la mère patrie, que ce soit en tant qu’assistant inspecteur de police que consul, le gouvernement italien lui a remis deux importantes décorations, celle de Chevalier de la République d’Italie, décoration prestigieuse équivalente à la Légion d’honneur en France, puis l’insigne de Chevalier de l’Ordre de l’Étoile d’Italie.

Il y a un millier d’Italiens vivant à Maurice et 8 000 Mauriciens installés en Italie. Être consul, c’est du boulot. Mais il ne s’en plaint pas. «Maurice est très important pour l’Italie qui y exporte pour Rs 6,5 milliards de produits tandis que Maurice envoie pour Rs 3,5 milliards de produits en Italie. Les relations entre nos deux pays sont excellentes.»

S’il a choisi de consacrer le magazine ITALMAG à plusieurs Italiens vivant à Maurice, c’est parce que ce sont surtout ceux qui sont dans la restauration qui sont connus des Mauriciens. «Les autres sont méconnus alors qu’ils contribuent à l’économie locale sous forme d’emplois. J’estime qu’il y a plus de 4 000 emplois générés par les entrepreneurs italiens à Maurice. C’est important de les faire connaître et de les valoriser.» Une vingtaine d’entre eux figurent dans le magazine ITALMAG mais on est encore loin du compte. Ce qui explique le souhait de Stefano Zinno qu’ITALMAG devienne périodique. Que sera sera…

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