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Budget 2025-2026
Rupture avec une politique fondée sur la redistribution sociale tous azimuts ?
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Budget 2025-2026
Rupture avec une politique fondée sur la redistribution sociale tous azimuts ?

Dans un contexte de marge de manoeuvre budgétaire extrêmement réduite, deux mesures significatives – à forte portée symbolique et économique – pourraient être annoncées : la révision progressive des allocations sociales financées par la Contribution sociale généralisée (CSG), et la hausse des droits de douane sur les importations de véhicules, y compris les modèles hybrides et électriques.
Ces décisions ne seraient pas sans conséquence. Elles traduiraient un recentrage budgétaire vers la soutenabilité des finances publiques et une volonté assumée de casser une dynamique de dépenses sociales devenues difficiles à financer.
Depuis son lancement en 2020, la CSG a généré environ Rs 44,6 milliards de recettes. Elle a permis au gouvernement de financer des mesures sociales d’urgence – allocations de revenus pendant la pandémie (Rs 20,8 milliards), revalorisation de la pension de retraite (Rs 8,6 milliards), aides familiales et scolaires (Rs 3,6 milliards). Mais ces largesses ont eu un prix : le fonds accuse un déficit de Rs 7,7 milliards pour les dix premiers mois de l’exercice en cours (2024- 25), avec un solde négatif de Rs 122 millions à fin avril.
L’arithmétique budgétaire est implacable. Le financement d’un État-providence ambitieux repose sur des bases instables. Les bénéfices sociaux devraient absorber près de 31 % du budget courant, Rs 65 milliards – bien au-dessus du budget combiné de la santé, de l’éducation et du logement (environ Rs 40 milliards) en 2024- 25. Ces quatre composantes représentent presque 50 % des dépenses courantes (estimées à Rs 210 milliards pour la même période. Il devient dès lors difficile d’allouer des ressources aux investissements économiques et au développement d’infrastructures productives.
Le ministère des Finances se retrouve aujourd’hui confronté à un dilemme majeur : maintenir des prestations sociales généreuses sans base fiscale pérenne, ou rééquilibrer la dépense publique vers la productivité. La première option n’est tout simplement plus tenable. C’est pourquoi la révision, voire la suppression progressive, de certaines allocations financées via la CSG, figure désormais parmi les pistes privilégiées.
L’autre mesure qui devrait figurer au Budget 2025-26 touche directement la consommation : une hausse ciblée des droits de douane sur les importations de véhicules, y compris ceux à motorisation hybride ou électrique dépassant 2 000 cc. Objectif : ralentir une dynamique d’importation devenue insoutenable, réduire la pression sur la balance commerciale et désengorger les routes. Les chiffres parlent d’euxmêmes : 35 915 véhicules neufs vendus en 2024, une hausse de 20 % par rapport à 2023.
De plus, depuis l’entrée en vigueur du Negative Excise Duty Scheme en juillet 2022 – qui accorde un remboursement de 10 % du prix d’un véhicule électrique jusqu’à un plafond de Rs 200 000 – le marché a connu une hausse significative. Résultat : 44 396 véhicules hybrides et 3 538 électriques ont été enregistrés en moins de deux ans. Cette frénésie d’achat a contribué à faire passer les importations de véhicules de Rs 6,8 milliards en 2010 à Rs 31,1 milliards en 2024, soit un taux de croissance annuel moyen de 11,5 %. Une telle tendance alimente le déficit de la balance commerciale, qui a atteint Rs 204 milliards en 2024, tout en exerçant une pression croissante sur les infrastructures routières.
En relevant les taxes douanières, le gouvernement espère, nous dit-on, freiner la consommation importée, préserver les réserves en devises étrangères et réorienter la politique fiscale vers des objectifs plus durables. Mais cette décision, si elle est confirmée, ne manquera pas de susciter la colère des concessionnaires automobiles. Ceux-ci, pressentant la manoeuvre, multiplient déjà les campagnes promotionnelles pour écouler leurs stocks, notamment dans les segments premium et électrique.
Une équation difficile
Le contexte dans lequel ce budget est élaboré ne laisse que peu de place à l’improvisation. Selon la Banque de Maurice, la croissance devrait osciller entre 3 % et 3,5 % cette année. En revanche, le déficit budgétaire est estimé à 9,5 % pour l’année fiscale 2024-25, tandis que la dette publique frôle les 90 % du PIB. Sous la vigilance des agences de notation comme Moody’s, le gouvernement n’a d’autre choix que de démontrer sa capacité à prendre des décisions courageuses dès le début de son mandat.
Ce Budget 2025-26 pourrait donc marquer la fin d’une ère budgétaire dominée par ce que les économistes appellent «le court-termisme social». Il portera probablement les premiers jalons d’un redressement économique et financier, axé sur la discipline fiscale, la rationalisation des dépenses et une meilleure allocation des ressources.
De l’avis des spécialistes, s’il est bien exécuté, ce changement de cap pourrait contribuer à restaurer la crédibilité budgétaire de l’État, même au prix d’un mécontentement social à court terme. Après tout, comme l’a souvent rappelé l’histoire économique, les ajustements les plus douloureux sont souvent les plus nécessaires pour assurer des lendemains meilleurs.
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