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Les scandales sous l’ancien régime impactent négativement le risque politique
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Les scandales sous l’ancien régime impactent négativement le risque politique
Le 18 octobre dernier, les premières bandes sonores de «Missie Moustass» étaient diffusées sur les réseaux sociaux, révélant un vaste réseau de système d’écoute téléphonique. Rapidement, quelques-uns des protagonistes entendus sur les enregistrements, parmi des politiciens et des journalistes chevronnés, confirmeront leur véracité.
Dès lors, la tempête allait se déchaîner avec une violence sans précédent, causant la perte du Premier ministre d’alors, Pravind Jugnauth, impuissant face à un ennemi invisible qui, au fil des 107 vidéos mises en ligne, a révélé les travers de l’ancien régime et le pourrissement des institutions. Si l’Alliance Lepep a été balayée tel un fétu de paille lors des élections générales, essuyant un cinglant 60-0, les «Missie Moustass Leaks» ont, sans nul doute, joué un rôle central dans cette débâcle.
À l’Assemblée nationale la semaine dernière, le Premier ministre, Navin Ramgoolam, a, à la lumière de l’enquête menée de concert avec des experts étrangers, confirmé que l’ancien régime avait bafoué les droits des citoyens en mettant en place un système ultrasophistiqué de surveillance des appels téléphoniques, mais aussi des réseaux de communication. Tout remonte à 2017, année qui coïncide avec l’accession de Pravind Jugnauth au poste suprême, lorsque le gouvernement fait l’acquisition d’un dispositif de surveillance développé par la société israélienne Verint. Puis, en 2022, l’État se tourne vers Pertsol, une société basée à Dubaï, qui installera à prix d’or (plus de Rs 5 milliards en sus des frais de maintenance annuels de Rs 337 millions) un dispositif d’espionnage capable d’enregistrer les appels téléphoniques et d’intercepter toutes les données échangées sur Facebook, TikTok, WhatsApp et Signal.
Étant un chef de gouvernement digne de ce nom, Navin Ramgoolam a joué cartes sur table, sachant pertinemment que cette révélation allait jeter encore un peu plus l’opprobre sur Maurice et entacher sa réputation. Il en a eu la démonstration avec le retour de manivelle suivant la publication du rapport sur le State of the Economy, avec Moody’s appliquant le couperet en maintenant la note souveraine du pays à Baa3, toutefois avec une perspective négative. On s’en est sorti de justesse en conservant notre statut de pays investissable (Investment grade) si précieux à un moment où la réputation de l’un de nos concurrents dans la région, en l’occurrence le centre financier de Kigali, est au plus bas en raison des exactions au Congo menées par les milices du M23 qui, comme on le sait, sont soutenues par le Rwanda.
Mais, décidé à opérer un grand nettoyage au cœur même de l’État, Navin Ramgoolam n’a guère le choix que de crever l’abcès et d’en drainer tout le pus. Le processus est douloureux, mais combien nécessaire. Encore une fois, il s’agira pour le chef du gouvernement de gérer les conséquences d’une telle révélation. Au vu de l’ampleur du scandale et de ses implications autant sur les libertés fondamentales des individus et des entreprises que sur la question de protection des données sensibles, la seule déclaration du Premier ministre, même si on ne doute pas de son bien-fondé, selon laquelle le système de surveillance de masse est désactivé ne suffira malheureusement pas.
Depuis la dernière campagne électorale, le risque politique et le risque sécuritaire du pays n’ont jamais été aussi élevés. Même s’ils expriment timidement leurs craintes, les chefs d’entreprise et les potentiels investisseurs étrangers sont extrêmement préoccupés par la perspective que l’État mauricien ait eu, à un moment donné, la capacité de les espionner et d’accéder à des informations hautement confidentielles, comme la liste de leurs clients, leur stratégie commerciale ou leur stratégie d’investissement.
Quand on parle de risque politique ou de risque sécuritaire, on fait référence à une composante essentielle qui influe, positivement ou négativement, sur le climat des affaires et sur les décisions d’investissement. Qu’on se le dise, aujourd’hui, les investisseurs internationaux n’avancent pas leur pion tête baissée sans effectuer au préalable un exercice de diligence raisonnable en bonne et due forme sur le pays où il compte réaliser leurs investissements. Si demain, Maurice est perçu comme un pays instable, avec une inclinaison vers des pratiques relevant plus de l’autocratie que de la démocratie, l’investisseur étranger, qui projette de mobiliser des fonds pour faire des affaires au sein de notre juridiction, deviendrait, à juste titre, suspicieux et pourrait se dire que, in fine, le risque qu’il encourt est trop grand.
Compte tenu du lourd héritage qui lui a été légué, le gouvernement du jour se retrouve dans l’obligation de corriger les erreurs du passé et d’instaurer une culture de gouvernance et de transparence à tous les étages dans les institutions. C’est à ce prix qu’il pourra rétablir la confiance. Se sentant trahis, les agents économiques ont perdu confiance dans les politiciens. Aujourd’hui, ils aspirent à un véritable changement et retrouver leurs libertés trop longtemps foulées aux pieds.
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