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Affaire «Reward money»
L’ACP Dunraz Gangadin, le poids des Rs 160 millions
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Affaire «Reward money»
L’ACP Dunraz Gangadin, le poids des Rs 160 millions

L’Assistant commissaire de police (ACP) Dunraz Gangadin reste en détention jusqu’à nouvel ordre. Hier, vendredi 25 juillet, il a été reconduit en cellule après sa comparution à Port-Louis. Il fait face à une accusation provisoire de blanchiment d’argent sous la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act (FIAMLA). A son arrivée en cour hier, le suspect Gangadin a été publiquement interpellé et hué par l’activiste politique Bruneau Laurette. Dunraz Gangadin devra à nouveau se présenter en cour, le 1er août. Son avocat, Mᵉ Yash Bhadain, a introduit une motion de remise en liberté sous caution mais sans insister pour qu’elle soit débattue immédiatement. L’audience par rapport à cette demande a été fixée au 7 août.
Lors de l’audience d’hier, les représentants de la Financial Crimes Commission (FCC) ont formulé deux objections principales à la libération de l’ACP Gangadin : le risque d’altération des preuves et celui d’interférence avec des témoins. Selon l’enquêtrice de la FCC, qui était contre-interrogée par Mᵉ Bhadain, l’investigation est encore à un stade préliminaire. Plusieurs dépositions ont été enregistrées mais d’autres témoignages sont attendus. Des documents cruciaux doivent encore être obtenus, a-t-elle précisé, ajoutant qu’il est difficile, à ce stade, de dire quand Dunraz Gangadin serait confronté aux éléments de l’enquête, car tout dépendra de sa progression.
Dunraz Gangadin, rappelonsle, a été arrêté jeudi, 24 juillet, par la FCC dans le cadre de l’enquête sur l’affaire «Reward Money». Celle-ci porte sur des transactions totalisant Rs 160,3 millions, effectuées entre janvier 2023 et novembre 2024. Ces montants étaient répartis en 13 chèques bancaires et provenaient directement du compte officiel de la police, qui était alors dirigée par le commissaire Anil Kumar Dip. Une part importante de ces fonds, soit Rs 76,8 millions, a ensuite été transférée sur le compte du sergent Yeshdeo Seeboruth. Ce dernier a également été arrêté par la FCC. Selon la FCC, les Rs 160 millions retrouvées sur le compte de Dunraz Gangadin proviendraient d’activités criminelles. L’enquête se poursuit.
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L’inspecteur «confidential clerk» et protégé politique
Entendu à titre de témoin jeudi après l’interrogatoire de Dunraz Gangadin, cet inspecteur de police n’était pas un fonctionnaire comme les autres. Il était le secrétaire confidentiel et chauffeur personnel de l’ancien CP, Anil Kumar Dip. Une proximité qui en disait long sur sa place dans le système. Il a gravi les échelons à une vitesse fulgurante, soutenu autant par des liens personnels que par une protection politique manifeste.
Tout a basculé après qu’il a pris en charge l’accident de la route impliquant le fils de l’ex-CP à Pailles. Cette prise de dossier délicate avait alors entraîné sa suspension mais il a rapidement été réintégré quand Anil Kumar Dip a été installé au sommet de la hiérarchie policière. Il a été promu sous la VIP Security Unit et rapidement nommé inspecteur.
D’aucuns considèrent qu’il est l’un des rouages essentiels du clan de l’ancien CP, où la loyauté personnelle semblait primer sur l’intégrité institutionnelle. Son zèle professionnel n’explique cependant pas tout. Il est aussi le neveu d’un ministre du précédent gouvernement, un lien familial qui lui aurait assuré un appui politique déterminant.
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Portrait : Entre loyauté aveugle et autorité contestée
Dunraz Gangadin, occupait une position clé aux Casernes centrales en tant que Staff officer. Il a été promu au fil des années et a été chargé de superviser la Special Striking Team (SST), remuante unité controversée. Il a multiplié les affectations dans des départements stratégiques: Western Division, Port-Louis Sud, Major Crime Investigation Team (MCIT), Independent Commission Against Corruption (ICAC), ainsi que le Complaints Investigation Bureau remplacé par l’Independent Police Complaints Commission.
Il s’est surtout illustré par des interventions médiatisées et des prises de position récentes en cour. Par exemple, lorsque l’avocat Akil Bissessur a été arrêté, Dunraz Gangadin s’est rendu en cour de Mahébourg pour s’opposer à la remise en liberté sous caution de l’avocat, alors que les représentants du bureau du Directeur des poursuites publiques n’objectaient pas à cette libération. L’ACP Gangadin s’est alors emporté, dénonçant une «volte-face choquante», selon ses termes, tandis que l’enquête était à peine amorcée.
Ce positionnement frontal contre le DPP s’est répété dans l’affaire Vimen Sabapati où l’ACP a tenté d’intervenir pour bloquer une remise en liberté. La magistrate Valentine Mayer l’a sèchement rappelé à l’ordre, précisant qu’il n’avait aucun mandat légal pour s’exprimer au nom de la police.
Il s’est aussi fait remarquer sur la scène publique. Lors d’une conférence de presse en novembre dernier, il a mis l’accent sur la récidive des trafiquants de drogue libérés sous caution, brandissant des dossiers relatifs à plus de 1 500 affaires. Une posture qui, selon certains observateurs, frôlait l’ingérence dans le fonctionnement du système judiciaire. Alors que l’enquête de la FCC sur le Reward Money Scheme progresse et que les soupçons de détournements importants de fonds publics se précisent, la question centrale est jusqu’où allait l’implication de l’ACP Gangadin ? Ce qui semble certain, c’est que son rôle dépassait le cadre administratif.
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