Publicité
Cannabis
La répression à bout de souffle
Par
Partager cet article
Cannabis
La répression à bout de souffle
Dans le sillage de la renaissance de la National Agency for the Treatment & Rehabilitation Of Substance Abuse et la nomination d’un Drug Czar, le débat autour de la dépénalisation ou la légalisation du cannabis naturel est relancé, oscillant entre les cris d’alarme de certains esprits conservateurs et les appels pressants d’une bonne partie de la société civile pour une réforme ou un changement. Le constat, pourtant, est sans appel : les politiques répressives en vigueur depuis des décennies sont inefficaces. Pire, elles alimentent un marché noir prospère, où les substances de synthèse, de plus en plus dangereuses, prennent peu à peu le dessus sur les produits naturels. Cette situation impose une réflexion plus profonde sur les alternatives, inspirées par les expériences étrangères et adaptées aux réalités locales.
Les témoignages émanant du terrain sont édifiants. Depuis l’instauration de sanctions plus sévères, l’usage du cannabis synthétique n’a pas faibli. Bien au contraire, il prospère dans l’ombre, poussant de plus en plus de jeunes à se tourner vers des produits de synthèse souvent fabriqués dans des conditions douteuses. Le poids de la répression pèse particulièrement sur les plus précaires : de jeunes usagers issus de quartiers populaires finissent derrière les barreaux, parfois pour quelques grammes seulement, aux côtés de criminels aguerris.
Cette politique punitive ne fait que renforcer les cycles d’exclusion et les inégalités sociales. Elle mobilise également des ressources policières et judiciaires disproportionnées, au détriment de la lutte contre les réseaux criminels organisés. Alors, faut-il persister dans cette voie sans issue ou emprunter le chemin du pragmatisme ?
Plusieurs pays, dont le Canada, l’Uruguay et certains États américains, ont fait le pari de la légalisation contrôlée. Loin de provoquer un effondrement social, cette réforme a permis d’encadrer la production et la vente, tout en menant des campagnes de prévention ciblées. Au Portugal, qui a décriminalisé l’usage de toutes les drogues dès 2001, les résultats sont probants : réduction des infections au VIH, baisse de la consommation chez les jeunes et renforcement des dispositifs de soin.
Ces expériences montrent que la prévention et l’éducation sont des piliers essentiels d’une politique efficace. Au Canada, par exemple, les écoles jouent un rôle clé dans la sensibilisation aux risques liés à une consommation précoce. Des campagnes publiques insistent sur les dangers pour la santé mentale, sans stigmatiser les usagers. Cette approche globale, centrée sur la santé publique, nous offre des pistes de réflexion pertinentes. Si tant qu’on ne détourne pas le regard.
Loin d’être une simple provocation, l’appel au changement de mentalité, que nous lançons depuis une quinzaine d’années, vise plusieurs objectifs : endiguer la montée des drogues de synthèse, créer des emplois et revitaliser le secteur agricole. Ce retour à la terre s’inscrirait également dans une démarche de développement durable. Plutôt que de céder à la tentation de bétonner davantage le territoire, la culture contrôlée du cannabis pourrait devenir une source de devises et attirer de nouveaux flux touristiques. Sur le plan de la sécurité publique, une telle mesure permettrait de libérer des ressources policières considérables.* Les «fumeurs du dimanche» cesseraient de remplir les prisons, laissant les forces de l’ordre se concentrer sur les véritables réseaux criminels.
Dans cette quête de nouvelles stratégies, les associations locales et internationales doivent jouer un rôle fondamental. Leur plaidoyer dépasse les logiques marchandes, défendant l’idée de Cannabis Social Clubs, où la production est collective et réglementée.
Ces structures soulignent que la santé des usagers est en péril, notamment à cause des substances de mauvaise qualité circulant sur les marchés clandestins.
L’usage de psychotropes est ancré dans l’histoire humaine depuis des millénaires. La prohibition, telle qu’on la connaît aujourd’hui, repose davantage sur des considérations politiques et morales que sur des données scientifiques. Cette vision doit évoluer.
Accepter la dépénalisation du cannabis naturel, ce serait admettre qu’un changement de paradigme est nécessaire. Il s’agit non seulement de protéger la santé publique, mais aussi de reconnaître les réalités d’un monde où les substances psychoactives ne disparaîtront pas par décret. Maurice, en s’inspirant des réussites internationales tout en tenant compte de ses spécificités, pourrait devenir un modèle dans la région. La peur du changement ne peut plus être une excuse. Le destin d’une génération en dépend.
Publicité
Publicité
Les plus récents




