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Eid-ul-Fitr célébrée sur fond d’apocalypse : Gardons en mémoire Hiroshima et Nagasaki

8 août 2013, 10:19

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Dans quelques jours, probablement le 9 août, le monde musulman célébrera la Eid-ul-Fitr. Ce sera un jour de réjouissance, après les sacrifices intenses du mois de ramadan.

 

Ce jour précis, hélas, ravive de tristes souvenirs. Soixante-huit ans de cela, les 6 et 9 août 1945 plus précisément, un évènement douloureux laissera des traces indélébiles sur l’histoire contemporaine et influera de manière négative sur nos perspectives de vie. «Enola Gay», «Little Boy», «Bockscar» et «Fat Man» sont des noms et des expressions  totalement étrangeres à la plupart d’entre nous. Il est donc utile de les expliciter. Enola Gay et Bockscarsont les noms des deux bombardiers américains qui furent utilisés pour larguer deux bombes atomiques, baptisées Little Boy et Fat Man sur les villes japonaises d’Hiroshima et de Nagasaki. Une décision grave prise par le président américain d’alors, Harry Truman, qui amena la reddition du Japon et précipita la fi n de la Seconde Guerre mondiale. Il est estimé que plus de 350 000 personnes, pour la plupart des civils, périrent dans ce bombardement.

 

Avec le passage du temps, notre mémoire collective s’est érodée et s’est rattachée à des perspectives nouvelles. Ceux qui ont physiquement vécu ces catastrophes sont peu à être encore en vie. Bien qu’indéniablement, les souvenirs de leur malheur soient encore vivants dans leur esprit, leur calvaire est étranger à de larges sections de la population mondiale contemporaine. Plus jamais ! Cela a depuis été le leitmotiv répété de ceux qui ont vécu ce triste évènement exprimé de manière simple, claire et continuelle par les victimes. Au «Memorial Cenotaph» du «Hiroshima Peace Memorial Park», on peut lire l’inscription suivante : «Que les âmes d’ici reposent en paix ;car nous ne répéterons pas ce mal. »

 

Cependant, l’avenir du monde et plus particulièrement celui de l’humanité pourrait dépendre dela manière dont on se souvient d’Hiroshima et de Nagasaki. Si ces bombardements ne sont qu’un simple souvenir d’un fait divers dans l’histoire de l’humanité, au même titre que les autres évènements de tous les jours, nous risquons de ne pas avoir la détermination politique pour maîtriser le risque potentiel que représentent les armes nucléaires pour l’humanité. Si par contre, nous gardons de ces bombardements le souvenir d’un fait saillant dans l’histoire de l’humanité, apparu à un moment où la paix était devenue une impérative nécessité, nous serons plus à mêmes de nous garder du coup du destin qui a frappé les habitants de ces deux cités.

 

Les signes qui apparaissent autour du Croissant Fertile ne présagent rien de bon pour l’avenir. Les tendances belliqueuses d’Israël à l’égard de l’Iran se font de plus en plus concrètes. La bande de Gaza est devenue la plus grande prison à ciel ouvert du monde, où la lutte pour la survie est devenue une constante. Le soulèvement en Syrie, qui est la résultante du Printemps arabe, est préoccupant et la population en a déjà subi les revers. L’instabilité en Egypte ne montre aucun signe d’apaisement et les présidents se succèdent de façon interminable. La violence ambiante au Moyen-Orient met la région à feu et à sang. Il nous faut, à tout un chacun, prendre conscience du fait qu’un conflit affectant un État peut rapidement se régionaliser compte tenu des liens sociaux, économiques et culturels qui unissent ces peuples. Il ne requerra qu’une étincelle pourque la région s’embrase et pour que la guerre se généralise.

 

Je ne suis pas un prophète de l’apocalypse, mais il est un fait que la guerre est probablement imminente.

 

Au cours des derniers mois, le Calife de la communauté musulmane Ahmadiyya, Hadhrat Mirza Masroor Ahmad, a mis en garde la plupart des chefs politiques des pays qui ont soit un intérêt dans la région ou qui ont une influence sur la région, leur faisant comprendre que sur la présente trajectoire, le Moyen Orient se dirige tout droit vers un conflit ouvert. Il a adressé le président Obama en ces termes : «Il est préoccupant, lorsque nous réfléchissons sur la situation actuelle dumonde, de constater que la graine d’uneTroisième Guerre mondiale a déjà étésemée. Plusieurs États, grands et petits,se sont dotés de l’arme nucléaire, et leshostilités entre les États sont sur unascendant. Dans les circonstances actuelles,la douloureuse perspective d’uneTroisième Guerre mondiale est devantnous. Comme une telle guerre présupposeratrès certainement l’utilisationdes armes nucléaires, cette perspectivenous mènera tout droit vers une terrifiante destruction. Si une atmosphèrede réconciliation et de justice avaitprévalu au lendemain de la SecondeGuerre mondiale, nous n’aurions pasvu ce dénouement se répéter de nouveau,tellement les pays sont submergéspar le démon de la guerre» (Lettre au président Obama, le 8 mars 2012).

 

Il y a le danger potentiel qu’en dépit de cette mise en garde, les intérêts politiques et économiques prennent le dessus sur le bon sens, la diplomatie, le dialogue et la sagesse. Nous osons espérer que, si la guerre, malgré tout, éclate, le souvenir d’Hiroshima et de Nagasaki revienne rapidement à l’esprit et à la rescousse des protagonistes.

 

Cet extrait d’un pamphlet publié par le «Hiroshima Peace MemorialMuseum» sur ce qui s’ensuivit immédiatement après l’explosion de 1945 peut nous permettre de mesurer l’ampleur des dégâts qui peuvent être causés: «La température de l’air au pointd’impact s’éleva à plusieurs millionsde degrés Celsius (la température minimaledes bombes conventionnellesest de 5 000 degrés). Quelques millionièmesde secondes après l’explosion,une boule de feu, émettant unechaleur intense, apparût. Après dixmillièmes de seconde, la boule de feuatteignit un diamètre de 28 mètreset une température avoisinant les300 000 degrés. Au moment de l’explosion,des rayons de chaleur intenseset de la radiation furent émis danstoutes directions, et une déflagrationexerçant une incroyable pression surl’air environnant, s’ensuivit. »

 

Un médecin qui se trouvait aux périphéries de la ville quand l’explosion s’est produite a écrit sur ce qu’il a vu alors qu’il se précipitait vers l’intérieur pour aider les victimes. Il a expliqué comment, quand il approchait le centre-ville, «une figureétrange s’est dirigée vers moi peu à peu,instable sur ses pieds. Elle avait certainementcomme la forme d’un hommemais il était complètement nu, ensanglantéet couvert de boue. Le corps étaitcomplètement gonflé. Des lambeaux detissus pendaient de son sein et son torsenu. Les mains étaient tenues devant lesseins avec ses paumes tournées vers lebas. L’eau s’égouttait des lambeaux.En effet, ce que j’avais confondu pourêtre des lambeaux de tissus étaient enfait des morceaux de peau humaine et les gouttes d’eau étaient du sang humain…. J’ai regardé la route devant moi. D’innombrables survivants, dénudés, brûlés et ensanglantés, se tenaient sur mon chemin. Ils s’étaient mis ensemble, certains rampants sur leurs genoux, d’autres à quatre pattes, certains se tenaient debout avec difficulté ou se penchaient sur l’épaule d’une autre personne » (Hida Shuntaro. “The Day Hiroshima Disappeared,” dans Hiroshima’s Shadows).

 

Le bombardement d’Hiroshima et de Nagasaki fait maintenant partie de l’histoire. Ces deux cités ne peuvent être ressuscitées. Les citoyens ont rebâti leurs villes d’eux-mêmes.

 

Quant à nous, essayons de prendre exemple de leur vécu et cela constitue une des plus grandes leçons que l’humanité doit apprendre : Nous sommes actuellement confrontés à la possibilité de notre extinction. Pas seulement notre mort, mais l’effrayante perspective de la mort de l’humanité tout entière. Cette éventualité est venue dans le domaine du réel après Hiroshima

 

Après le bombardement de Hiroshima et de Nagasaki, Albert Camus, l’une des très rares voix de protestation après l’explosion de la bombe atomique sur Hiroshima, résuma la situation parfaitement, ainsi :

 

«Nous nous résumerons en une phrase: la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l’utilisation intelligente des conquêtes scientifiques…. Devant les perspectives terrifiantes qui s’ouvrent à l’humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d’être mené. Ce n’est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l’ordre de choisir défi nitivement entre l’enfer et la raison. »

 

Eid est un moment de réjouissance. A cette occasion, faisons tous en choeur cette requête aux dirigeants de ce monde : Permettez- nous de vivre de nombreux Eid à venir.

 

Eid Mubarak

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