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Message conjoint du cardinal Piat et de Mgr Ernest: Aller vers l’autre, dans l’esprit de Noël
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Message conjoint du cardinal Piat et de Mgr Ernest: Aller vers l’autre, dans l’esprit de Noël

Maurice E. Piat (MEP)
Chers frères et soeurs Mauriciens, Avec Mgr Ian Ernest, je voudrais vous souhaiter à tous un bien joyeux Noël. Nous sommes heureux d’être ensemble aujourd’hui pour partager avec vous la Bonne Nouvelle de la naissance de Jésus, le Fils de Dieu fait homme. Car Noël est une fête qui est porteuse d’un message de grande consolation et de grand encouragement pour tous les hommes.
Ian Ernest (I.E)
Quelle joie d’être réunis pour porter ensemble ce message d’encouragement et de réconfort qui traduit concrètement ce que nous célébrons à Noël – nous fêtons la venue de Dieu qui se rend présent au monde – une présence qui donne à notre vie un ton festif car elle nous mène à construire la paix que le monde ne peut donner. Dans ce monde affligé par les conflits, les guerres, les haines et le mépris – la venue du Christ en toute humilité nous surprend car elle vient pour transformer nos coeurs et nos vies.
MEP : Comment la simple présence de Dieu dans notre monde peut-elle avoir un tel impact dans nos vies ? Prenons des exemples pour comprendre :
Lorsque j’étais professeur au Collège du St Esprit, un de mes élèvesavait fait un accident de moto ets’était cassé la jambe en trois endroits. Avec quelques-uns de ses camarades de classe, j’avais été lui rendre visite à l’hôpital Candos. Je me souviens qu’il nous expliquait avec beaucoup de détails combien le médecin et les infirmiers s’occupaient bien de lui, comment ils se servaient d’appareils sophistiqués pour réparer sa jambe. Pendant qu’il parlait, j’avais remarqué une vieille dame, tout de noir vêtue, assise à côté de son lit et qui ne disait pas un mot.
Il avait dû surprendre mon étonnement et mes yeux interrogateurs. Alors il me dit : «Vous voyez cette vieille dame ? C’est ma grand-mère. Elle vient là tous les jours à 6h00 a.m. et part à 6h00 p.m. Elle ne dit pas grand-chose mais elle est là à mes côtés. Même si les médecins et les infirmiers me soignent très bien, c’est elle qui me donne du courage et me fait tenir».
Cela m’a fait comprendre l’impact considérable que peut avoir une simple présence discrète mais fidèle dans nos vies.
I.E. : Oui, quand nous accueillons cette présence, elle nous parle de l’Amour – de cet amour vrai profond dont nous avons besoin si nous voulons que notre vie ait un sens. Somerset Maugham, grand romancier anglais, a écrit cette phrase qui en dit long sur l’amour :
«La grande tragédie de la vie n’est pas que les gens périssent mais qu’ils cessent d’aimer.»
Il y a plusieurs années de cela, j’ai fait la rencontre d’un petit garçon de sept ans dont les parents allaient se séparer – et pour combler ce vide qui allait venir, ils donnaient des cadeaux et des cadeaux à l’enfant – mais malgré cela, l’enfant était malade et les parents insistaient que l’enfant avait tout – mais en lui parlant – l’enfant m’a dit : «Je ne veux pas de leurs cadeaux, ce que je veux, ce que Maman et Papa s’aiment». C’est bouleversant mais combien vrai.
Et tout au long du temps de l’Avent, précédant la fête de Noël, nous avons entendu par la voix des prophètes de l’Ancien Testament les promesses faites par Dieu pour libérer son peuple de toutes formes d’oppressions et d’esclavages. Cette rencontre de Dieu avec les hommes et les femmes qu’il a créés avec passion, amour vient réaliser ce qu’il nous a promis – les promesses sont les fondations sur lesquelles se pose une relation – si ces promesses ne sont pas tenues, la relation s’écroulera comme une maison construite sur le sable – Dieu a fait alliance avec nous, il s’est engagé à faire de nous des gens heureux – toute l’histoire d’Amour entre Dieu et toute l’humanité est marquée fortement par la fidélité inébranlable de Dieu par rapport aux promesses faites.
Mais nous savons que nous, nous ne sommes pas capables de tenir nos promesses. Ceci donne lieu à des tragédies humaines. Dans le livre du Prophète Ésaïe, il est clairement dit :
«Dieu se livrera pour avoir compassion de vous, car l’Éternel est un Dieu juste : Heureux tous ceux qui espèrent en Lui» (Esaïe 30.18)
Ceci s’est réalisé par la venue du Messie promis par les Saintes Écritures. Ce Messie c’est le Christ qui vient établir le Règne de Dieu - en règne de justice, de paix, de fraternité et d’abondance.
Cette présence, cette rencontre avec Dieu nous permet de comprendre que nous tous avons de la valeur aux yeux de Dieu – le monde dans lequel nous évoluons est tristement célèbre par la haine et le mépris que nous portons en nos coeurs, quand nous sommes incapables d’accueillir ceux qui sont différents de nous. La diversité devrait au contraire enrichir notre vie commune car nous sommes appelés à être et à vivre ensemble.
MEP : Noël, c’est la fête de la présence de Dieu avec nous. Cette présence avait été annoncée par les prophètes. Cette présence de Dieu qui s’est manifestée dans la naissance de Jésus est déroutante : elle est très simple, sans rien de grandiose ou de spectaculaire.
Dieu se rend présent sous les traits d’un petit enfant, qui ne sait pas parler, qui ne peut pas se débrouiller tout seul, qui a besoin des autres pour survivre.
Dieu se rend présent sous les traits d’un enfant pauvre. Sa maman, la Vierge Marie, n’avait ni les moyens, ni le backing, pour obtenir une bonne chambre pour accoucher. Elle a dû se contenter d’une petite écurie pour donner naissance à son enfant.
Dieu se rend présent sous les traits d’un enfant vulnérable. Très tôt après sa naissance, sa vie a été menacée par le roi Hérode. Et ses parents et lui ont dû fuir à dos d’âne, marcher des jours et des jours en plein désert, comme les migrants d’aujourd’hui, pour trouver un endroit où ils seraient en sécurité.
Cette manière de se rendre présent nous dit certaines choses sur Dieu : Il est un Dieu humble qui ne cherche pas de privilèges, qui ne cherche pas à être acclamé. Il est aussi un Dieu qui veut se faire proche des pauvres, de tous ceux qui n’ont pas de protection et sont ballotés dans la vie. Il veut être proche d’eux pour leur dire qu’eux aussi, ils ont de la valeur à ses yeux, qu’il les aime et qu’il est solidaire avec eux.
I.E. Une présence est toujours une source d’encouragement et de joie. La présence des parents à la maison contribue énormément à la vie familiale, à son épanouissement, à son bonheur. Beaucoup d’enfants malheureusement reprochent souvent aux parents leurs absences. Car toute présence nous construit, nous fait grandir, nous développe, nous console – je me rappelle de ces mots d’un cantique que mes parents ont chanté avec moi quand j’étais enfant : «Quel bonheur d’être en famille, d’être aimé, surtout d’aimer, c’est là que l’homme fort peut se former.»
Ainsi va la présence de Dieu, elle nous aide tous à développer une vie qui soit construite sur le roc – des valeurs indispensables tels que la capacité d’aimer, de pardonner, de faire la route avec confiance malgré les difficultés et les épreuves de la vie. Une présence qui façonne le bonheur auquel nous espérons tous.
La présence de Dieu en Jésus à l’étable traduit concrètement comment Dieu rassemble ceux qui sont rejetés par les puissants, les riches, les forts – Marie et Joseph n’ont pu accueillir leur premier né dans un endroit confortable. Comme les réfugiés d’aujourd’hui, on les a poussés vers le dehors, le froid, le noir, comme des indésirables.
Les bergers, marginalisés par la société juive, tout comme Marie et Joseph, se sont retrouvés à l’étable en présence de Dieu. Ils avaient de la valeur aux yeux de Dieu. Noël vient nous rappeler cette réalité – que nous, qui sommes façonnés et créés avec passion à l’image de notre créateur, sommes précieux pour lui. L’exemple de Mère Térésa, du Mahatma Gandhi, inspirés de la vie de Jésus nous parle de cela. Nous sommes précieux aux yeux de Dieu. Leurs combats respectifs se sont fondés sur ce principe.
Très souvent nous ne le sommes pas pour les autres – parfois au travail, dans la vie sociale et de même dans la famille nous souffrons de l’isolement, du mépris, de la moquerie ou des manques d’opportunités car nous sommes différents. Mais Noël célèbre la naissance d’un sauveur – celui qui vient rétablir la justice de Dieu où tous sont considérés – Il est donc important que nous nous mobilisions pour rétablir les vraies valeurs de la gouvernance qui donneraient à tout un chacun la joie d’être considéré.
MEP : Cette présence de Dieu avec nous qui se manifeste à Noël, c’est cela le plus grand cadeau que Dieu nous fait. Dieu ne nous donne pas simplement des choses qui sont extérieures à lui et qui servent à nous donner un peu de confort. Dieu se donne lui-même, il nous donne toute son affection, sa tendresse, son écoute, son attention, son soutien.
Le cadeau de sa présence, Dieu le fait à tous les hommes
- qu’on soit chrétien ou d’une autre religion
- qu’on soit riche ou pauvre
- qu’on ait réussi ou qu’on ait échoué
- qu’on soit tombé dans de gros péchés ou dans de petits péchés.
C’est un cadeau que personne ne peut mériter et qu’on ne peut accueillir qu’avec beaucoup de gratitude. Ce cadeau nous remplit le coeur de joie. C’est pourquoi, sans doute les hommes et les femmes de toute culture/religion veulent faire de la fête de Noël un temps de joie, un temps où l’on se souhaite la joie.
I.E. : Actuellement, nous vivons un temps exceptionnel car c’est la saison des cadeaux – nous passons beaucoup de temps à rédiger nos listes de cadeaux pour démontrer notre amour et exprimer notre reconnaissance à ceux qui nous ont aidés durant l’année. Mais ce que nous achetons dans les Malls, parfois à des prix chers, ne peuvent traduire de manière concrète ce que nous portons au plus profond de nous. À l’exemple de Dieu, qui nous a donné son Fils, Sauveur du Monde, essayons de donner de ce que nous ne pouvons acheter.
Il est temps que ce monde centré sur lui-même, sur son pouvoir, sur ses acquis soit capable à travers nous, de faire la différence – l’exemple d’un enfant qui reçoit un gros cadeau cher mais qui ensuite se met à jouer avec une simple bouteille devrait nous interpeller.
L’autre a besoin de ma présence qui soit gratuite, d’une visite qui soit imprégnée de tendresse, de sincérité, d’une écoute qui soit capable de redonner courage, et le goût à la vie. Au cours de la semaine dernière, j’ai reçu une soixantaine d’enfants venus d’une région très défavorisée du Sud de notre pays à l’occasion de la Noël. Ces enfants m’ont impressionné, ils possédaient cette envie de bien faire, ils avaient un comportement irréprochable. Tout ceci grâce à des encadreurs bénévoles qui, durant huit ans, ont su les accompagner, les écouter, les corriger. Par leur persévérance, ces enfants sont capables d’assumer dès maintenant leur responsabilité citoyenne.
Ainsi le plus beau cadeau que nous pourrions offrir, comme Dieu lui-même l’a fait – c’est de se donner aux autres sans rien attendre. L’histoire de la naissance du Christ nous parle du don gratuit de Dieu à l’humanité – un amour profond, durable, sincère – et je souhaite qu’elle nous pousse à aller vers les autres, pour leur offrir de ce que nous avons de meilleur en nous. Nous tous, sans exception, avons du bon en nous. Ma visite à la Prison cette semaine m’a permis de découvrir la générosité, la bonté, la capacité de ceux qui, malgré les fautes commises, peuvent être réconciliés à la vie et avec les autres quand ils sont encouragés à le faire et à le vivre.
MEP : Quand nos frères et soeurs souffrent, le plus grand cadeau que nous pouvons leur faire, c’est ce genre de cadeau qui sort du coeur. Par exemple : quand nous rencontrons des toxicomanes et leurs familles, ne soyons pas avares de notre temps, donnons notre temps, donnons de nous-mêmes généreusement.
Ce genre de cadeaux sont des signes lumineux qui montrent que chacun a de la valeur devant Dieu, qu’ils existent, qu’ils comptent pour quelqu’un, qu’on ne les oublie pas, qu’ils ne sont pas rejetés parce qu’ils prennent la drogue, parce qu’ils ont le Sida ou parce qu’ils dorment dans la rue.
Ne soyons pas avares de notre écoute, soyons disponibles pour s’asseoir avec eux, les écouter, les encourager, les soutenir.
I.E.: Si nous nous laissons imprégnés par l’esprit de Noël, nous deviendrons pour les autres des instruments de grâce, des signaux lumineux et des moyens par excellence par lesquels des personnes vont redécouvrir ce «fighting spirit», cette volonté de se battre – sachant que la lumière de Dieu saura vaincre le monde de ténèbres où la peur, la violence font rage – où la maladie, le manque d’amour détruisent le corps et les vies. Donc il est important que nous allions vers ceux qui sont malades – et surtout ceux qui vivent avec le diabète, le cancer, d’autres maladies incurables. Une thérapie et un accompagnement médical ne suffisent pas – ces personnes ont besoin d’attention, d’écoute de compréhension, de présence, de patience – il nous faut aussi s’occuper de ces familles qui ont chez elles une personne malade.
Il est important de réaliser que la présence de Dieu peut nous mener à un changement d’attitude et de comportement. C’est-à-dire l’habilité d’ôter de nos coeurs cette indifférence qui tue. Jésus dans son ministère s’est toujours rapproché des malades, de leurs familles – il a su par sa présence apporter la guérison, la libération et le don de la vie. Nous sommes appelés aujourd’hui à suivre l’exemple de Jésus. La paix, comme le dit l’histoire de la naissance du Christ, est donnée aux personnes de bonne volonté. Ce serait utile que les jeunes de notre génération voient que la génération des adultes d’aujourd’hui est de bonne volonté, capable d’aller vers et d’aider ceux qui sont affligés par les circonstances de la vie : sans considération, sans réconciliations il n’y aura pas de réhabilitation et de transformation.
MEP : Nous pouvons aussi nous faire ce genre de cadeau qui sort du coeur dans nos familles. Par exemple : donner de son temps, de son attention, de son écoute régulièrement
- à son conjoint
- à ses enfants
- aux personnes âgées de la famille
- à ses frères et soeurs.
Ce genre de cadeau donne beaucoup de joie, une joie profonde, solide, durable. Ce genre de cadeau, nous pouvons le faire tout au long de l’année – ça ne coûte rien, c’est gratuit et ça fait tellement plaisir.
Conclusion
I.E. : Cette présence manifestée par la naissance de Jésus exprime de manière parfaite ce qu’est l’amour gratuit, cet amour qui se donne, cet amour qui donne à la joie toute sa pureté et qui reflète la beauté de Dieu luimeme. La présence de Dieu s’exprime par notre obéissance à la volonté de Jésus – «aimez-vous les uns les autres».
L’amour est donc cette lumière qui éclaire, qui fait surgir la confiance, et qui dissipe tout ce qui appartient aux ténèbres, la peur, la violence, la mort, la séparation, la haine, l’intolérance, le manque de pardon.
Nous faisons certainement face aux incertitudes at aux défis de la vie de tous les jours, mais que la lumière de la fête de Noël – Dieu présent au milieu de nous – fait vibrer en nous le désir d’être illuminés par le Christ. Cette vie que nous partageons avec les autres dans la famille, au travail, avec ceux qui sont différents et dans l’ensemble de la société mauricienne est d’une même dynamique – nous avons besoin de vérité, de miséricorde, et de confiance.
Malheureusement, la pauvreté, surtout sur le plan économique et affectif, qui accable certaines personnes, la corruption et l’abus de pouvoir qui marginalisent les plus faibles semblent prendre le dessus. Nous ne pouvons laisser ces choses nous dominer – ayons le courage par la présence d’un Dieu d’amour pour dénoncer toute absence de justice, de sagesse et de compassion dans la gouvernance de nos vies. Ne laissons pas les intérêts égocentriques et la gourmandise des uns et des autres nous éloigner de la présence généreuse de Dieu.
La présence de Dieu est reflétée par notre présence envers les plus faibles et fera jaillir une lumière – celle qui illuminera le monde de paix, de justice, d’amour, de joie et de vérité. Soyons porteurs de la lumière de Dieu. Soyons responsables et vivons selon son amour et soyons joyeux de travailler les uns pour les autres sans discrimination aucune.
En vivant de cette manière, nous nous engageons à être présents aux autres – c’est la miséricorde en action – c’est le cadeau le plus précieux que Dieu offre à l’humanité et nous sommes responsables de la partager avec les autres pour que tout un chacun se sente aimé et considéré. C’est la joie de Noël.
MEP : Cet engagement à être présent construit aussi la paix. Ste Mère Térésa disait «la paix surgit quand tu te donnes aux autres». Noël est la fête de la Présence de Dieu dans nos vies. Cette présence est source de paix parce que Dieu s’est donné lui-même pour être avec nous.
Cette paix continuera dans notre pays, dans nos familles, si nous nous mettons à aller vers les autres comme Dieu est venu vers nous.
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