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Négociations
«From Diego Garcia to Gaza»
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Négociations
«From Diego Garcia to Gaza»
Au moment où vous lirez ces lignes, les bombes cesseront de massacrer, peut-être, les innocents à Gaza. Incroyable que ce soit cela qu’il a fallu «négocier» : se mettre d’accord pour ne plus tuer des enfants et des femmes, surtout, car ils font 70 % des 47 000 victimes de Gaza. Autre négociation, à PortLouis et à Londres, le respect de la souveraineté mauricienne sur les Chagos, le retour éventuel de ses habitants et l’équitable compensation qui est due…
Chagos
En dépit des verdicts des tribunaux internationaux et des résolutions des Nations unies en sa faveur, il a fallu à Maurice de persister à «négocier» quand même avec l’ancienne puissance coloniale. Et lorsque celle-ci, avec les États-Unis, a explicitement reconnu, le 3 octobre 2024, son droit sur les Chagos, il a fallu encore «négocier». Rien d’étrange lorsque nous savons que ceux qui sont dominants «négocient» jusqu’à la possibilité pour eux de massacrer, ou non, des innocents comme dans le cas de Gaza.
Or, que ce soit pour Gaza ou les Chagos, y compris Diego Garcia, les principes éternels, universels et fondamentaux d’intérêt commun et de droits humains ne doivent jamais être négociables. À force de nous laisser prendre dans le jeu des stratégies, des conjonctures et des tactiques de la politique, de la diplomatie et de la communication, nous pouvons finir par ne plus distinguer le vrai du faux, le juste de l’injuste, le digne de l’indigne. Bref, il ne doit jamais être admissible de laisser Gaza ou Diego Garcia à une force d’occupation illégale, car c’est de cela qu’il s’agit. Ce n’est pas un élément négociable. Le principe de souveraineté, très particulièrement, ne se marchande pas, même si certains veulent s’imposer à tout prix car pour eux «Might is Right».
C’est dans ce contexte précis qu’il convient de saluer le mouvement Lalit pour le rappel qu’il nous lance à assumer notre responsabilité, chacun là où il est. Dans une lettre ouverte datée du 14 janvier 2025, adressée à «Any and each Minister», Lalit nous ramène à notre devoir de principe concernant l’avenir de Diego Garcia. Ces «Ministers» issus de partis politiques qui ont combattu pour l’Indépendance, contre l’impérialisme post-colonial, pour la cause palestinienne, pour rann nou Diego, pour la démilitarisation et la dénucléarisation de l’océan Indien comme zone de paix, pour la sauvegarde de l’environnement de notre zone maritime, ou simplement pour le mauricianisme et l’honneur de la République, ont-ils arrêté de résister ? L’alternative est-elle synonyme du compromis des principes qui les animaient jadis ?
Si nous voulons parler des enjeux actuels qui sont très concrets, et pas uniquement de principes, comment peuton alors négocier un retour de notre souveraineté sans qu’il ne soit possible aux Mauriciens de se rendre à Diego Garcia, notamment ceux d’origine chagossienne ? Comment peut-on négocier uniquement l’implantation dans seulement quelques petits îlots éloignés alors que Diego Garcia est le cheflieu dont la superficie compte pour plus de la moitié de tout l’archipel ? Est-ce viable, et à quel prix, notamment avec les impacts du changement climatique sur ces îlots menacés par la montée des eaux ?
Et que représentent les quelques Rs 5 milliards annuellement comme rente pour une location forcée de Diego Garcia, aujourd’hui ou dans 99 ans avec l’inflation, en comparaison à ce que nous vaut l’opportunité d’un développement durable, juste et intégré de notre zone économique exclusive, comme nous avons l’autorité pour le faire selon le droit international ? L’ambassade des USA à Maurice a coûté bien davantage et un seul avion américain F-35B est encore plus cher. Il convient de souligner que comme financement qui nous est légitimement accessible à travers les fonds verts, y compris pour les Chagos, un niveau d’investissement conséquent est envisageable. Cela, au nom de la justice climatique, de la coopération internationale impliquant nos partenaires économiques, de manière plus morale en accord avec notre conscience et dans le respect de notre dignité…
Négocier pour sauver la vie des innocents est une chose, négocier pour louer ou vendre une base militaire contre de l’argent est autre chose. Dans ce dernier cas, comme élément de «négociation» si nous ne sommes pas forcés de nous soumettre, ne doit-on pas imposer certaines conditions afin que, précisément, notre territoire ne soit plus utilisé pour tuer des innocents ? Tant de victimes «collatérales» ya-t-il eu dans le passé impliquant des bombardiers à partir de Diego Garcia, et aussi des cas honteux de détention, de torture et, peutêtre pire, de prisonniers qui n’auraient jamais dû transiter sur cette partie de notre territoire qu’est Diego Garcia.
Ne faut-il pas exiger que la loi internationale soit toujours scrupuleusement observée ou que les actions entreprises par un «locataire» éventuel soient préalablement mandatées par les Nations unies ? Ne faut-il pas aussi s’assurer que nous ne soyons pas en violation avec les conventions que nous avons ratifiées comme celle sur l’interdiction des armes nucléaires, le traité de Pelindaba ? Et quel visage montrerons-nous vis-à-vis, par exemple, de nos amis africains et les pays du Sud, ceux qui nous ont soutenus dans la lutte pour libérer les Chagos de la décolonisation, si nous n’agissons principalement que pour de l’argent ? Et avant toute chose, est-ce ainsi que nous ferons justice aux Chagossiens ?
Palestine
Les Chagossiens, appelés quelquefois les Palestiniens de l’océan Indien, ne sont plus au cœur de nos préoccupations car, autrement, nous aurions vraiment fait payer les forces d’occupation coloniales. Pas nécessairement en dollars, mais en leur faisant rendre des comptes devant le tribunal de l’Histoire pour les torts commis à ces femmes, hommes et enfants des Chagos, comme à leur mémoire, à leur culture et aux écosystèmes de leurs lieux de naissance. Il est de même pour Gaza : Netanyahu et les siens, ne seront-ils plus poursuivis devant les cours internationaux ? L’argent ne suffira jamais pour réparer tout le mal que les Palestiniens ont subi, mais ne faudra-t-il pas négocier une reconstruction durable de Gaza pas seulement infrastructurellement, mais aussi à travers des transformations institutionnelles locales, régionales et globales afin d’empêcher que des massacres génocidaires puissent ainsi se faire sur les hommes comme sur les patrimoines immatériels, naturels et historiques ? Là-bas, encore, ou ailleurs.
La page Facebook de Netanyahu affichait surtout des messages de condoléances suite aux décès de soldats de Tsahal à Gaza avant le cessez-le-feu. «For the first time, Israel just lost a war», vient d’afficher un article dans la presse israélienne. Mais il est hors de question de se réjouir avec tant des dizaines de milliers de victimes, la plupart des femmes et des enfants. Il est évident que l’envoyé spécial de Trump, obligeant Netanyahu à le recevoir durant le sabbat, ne lui a laissé aucun choix, preuve que les «négociations» sont aussi une question de timing. En fait, Trump ne négocie pas. Pour une fois, tout semble converger pour forcer l’armée sioniste à faire taire ses armes. Tout le monde, sauf pour quelques faucons sanguinaires, en a marre de ce que l’Histoire ne tardera pas à reconnaître comme un génocide. D’ailleurs, Netanyahu fait profil bas depuis. Ses proches alliés, encore plus extrémistes que lui, sont déchaînés devant sa «capitulation». Entretemps, les familles des otages et le peuple palestinien respirent et attendent un avenir meilleur.
Il y a une possibilité de paix si des négociations tangibles aboutissent avec la libération du dirigeant palestinien Marwan Bargouthi, emprisonné en Israël depuis 2002. Beaucoup voient en lui le Mandela Palestinien. Espoir en Syrie et au Liban aussi où, là-bas également, se trament toutes sortes de négociations. Toutefois, il faut se méfier de toute négociation qui ne se fonde pas sur les principes éternels, universels et fondamentaux d’intérêt commun et de droits humains. Nous pourrions bien être à la veille d’une soi-disant normalisation des relations avec l’État sioniste derrière, et sur le dos, du peuple palestinien, comme en 1978 avec les accords de Camp David sous l’administration Carter. Ce dernier, auteur d’un ouvrage intitulé Palestine : la Paix, pas l’Apartheid comme pour se pardonner, avait négocié un traité qui ne fonctionnait que dans la mesure où il transmettait deux problèmes aux générations futures : le droit à l’auto-détermination des Palestiniens et le statut des territoires occupés.
Il nous est interdit de négocier, pour revenir à Diego Garcia, pas seulement derrière, et sur, le dos des Chagossiens mais aussi en contradiction avec nos principes. Plus qu’un parti extraparlementaire, Lalit incarne, dans le contexte du 60-0 historique, une boussole par rapport au changement promis dans la gouvernance de nos affaires courantes et par rapport à notre vision d’un monde humainement plus solidaire, dans le respect de la nature également. De toute manière, la négociation reste l’art de la prudence. N’est-ce pas Netanyahu qui affirmait que nous ne pouvons pas mettre fin à une négociation quand nous ne l’avons jamais commencé ? Qui se souvient quand il a commencé, Netanyahu lui-même, de négocier pour de bon ? De même pour Trump, souvenonsnous du fait que les négociations avec lui sur les Chagos ne peuvent terminer… car elles n’ont jamais vraiment démarré pour lui !
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