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Enseignement supérieur
Fin de gratuité pour les étudiants à temps partiel : apprendre… à leurs dépens
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Enseignement supérieur
Fin de gratuité pour les étudiants à temps partiel : apprendre… à leurs dépens

La fin de la gratuité de l’enseignement supérieur pour les étudiants à temps partiel est source de polémique.
Platon, dans La République (Livre IV, traduction de Luc Brisson), écrivait : «Ainsi, pour tout dire en peu de mots, les gardiens de l’État doivent veiller à ce que rien ne corrompe l’éducation…» En annonçant la fin de la gratuité de l’enseignement supérieur pour les étudiants à temps partiel dans le Budget 2025-26, le Premier ministre romprait-il avec sa vision de l’apprentissage comme étant un ongoing process ? Dans un article publié par le Government Information Service, le 8 mai, à l’occasion d’une réception à la State House en l’honneur des 49 lauréats du Higher School Certificate 2024, il soulignait que l’enseignement supérieur est une occasion unique de développement tant professionnel que personnel. Or, ce développement se limiterait-il au format d’un programme (temps plein plutôt que temps partiel) ou aux contraintes budgétaires de l’État ?
Arvind Bhojun, président de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE)
«Un pas en arrière»
Arvind Bhojun exprime ses réserves : «C’est un pas en arrière. Avec la cherté de la vie, beaucoup de parents ou de jeunes se voient dans l’obligation de travailler et de suivre des cours à temps partiel.» Il met en lumière l’importance des études tertiaires à temps partiel pour assurer «la continuité de l’apprentissage».
Il déplore que cette annonce ait été faite sans consultation avec les parties prenantes. Selon lui, il s’agit d’une décision qui pourrait ériger des barrières à l’accès à l’enseignement supérieur. Il rappelle qu’il est encore temps de faire marche arrière : «Les ministres concernés devraient consulter les parties prenantes –syndicats, parents et élèves.» Il lance ainsi un appel, au nom de l’UPSEE, pour que la décision soit revue: «Cette décision va à l’encontre de la philosophie d’équité, d’égalité et d’inclusion.»
Leela Devi Dookun-Luchoomun, ex-ministre de l’Éducation
«On ne permet pas à tout le monde de réussir»
Leela Devi Dookun-Luchoomun déclare : «L’idée, c’était de permettre à tous les jeunes Mauriciens, capables et désireux de poursuivre leurs études supérieures, d’en avoir la possibilité. Beaucoup n’ont pas les moyens financiers pour continuer et doivent commencer à travailler avant de pouvoir reprendre leurs études.»
Elle trouve regrettable qu’une grande partie de la population se voie privée de l’opportunité d’accéder à l’enseignement supérieur. Elle ajoute : «Cela permettait à beaucoup d’obtenir des promotions dans leur carrière. Tout cela est fini !» Elle déplore également: «C’est dommage car on ne permet pas à tout le monde de réussir.»
Judex Soulange, «Chartered Marine Engineer» et directeur du Primus Training Centre
«L’État doit prôner une politique d’éducation inclusive»
Judex Soulange explique : «Je suis en faveur de l’éducation académique et professionnelle. En mettant fin à la gratuité de l’enseignement supérieur pour les étudiants à temps partiel, le gouvernement met un coup de frein à l’élan éducatif du pays.»
Il partage son expérience :«Lorsque j’étudiais en Écosse, je suivais mes cours à temps partiel. Je comprends les contraintes de ceux qui doivent jongler entre les responsabilités professionnelles et la poursuite des études supérieures. Ce n’est pas chose facile, et je salue le courage de celles et ceux qui ne baissent pas les bras.» Il ajoute que l’État doit prôner une politique d’éducation inclusive. «Il y a des apprenants au rythme plus lent ou encore ceux qui choisissent de se professionnaliser et de se spécialiser plus tard dans leur parcours. On ne doit pas négliger cette réalité ni leur imposer des contraintes supplémentaires.» Il conclut en posant cette question : «Comment cela va-t-il se passer pour ceux qui n’ont pas les moyens, qui doivent travailler pour subvenir aux besoins de leur famille, mais qui ont le rêve, l’envie et la passion de poursuivre des études supérieures ?»
Kaviraj Sukon, ministre de l’Enseignement supérieur
Une situation budgétaire difficile
Kaviraj Sharma Sukon tient à apporter certains éclaircissements. Tout d’’abord, le régime de gratuité de l’enseignement supérieur de premier cycle (FTES) sera désormais limité aux étudiants inscrits à temps plein dans les universités publiques. Néanmoins, les bénéficiaires du FTES dans les établissements publics continueront d’en bénéficier, conformément aux engagements déjà pris.
Ensuite, il explique que cette décision s’inscrit dans un contexte marqué par une situation budgétaire difficile, héritée d’un manque de planification rigoureuse par le précédent gouvernement. Il ajoute que même si la mesure initiale était animée par de nobles intentions, elle a été mise en œuvre sans une évaluation rigoureuse de sa viabilité financière. Il soutient que cette mesure vise à préserver la stabilité du système d’enseignement supérieur, tout en assurant un accès équitable à une éducation de qualité pour les générations à venir. Il souligne que malgré ce changement, le gouvernement reste profondément attaché au principe de gratuité et espère pouvoir le rétablir dès que les conditions économiques le permettront.
Il conclut en affirmant que l’État s’engage à assurer une transition équitable, fluide et respectueuse des droits acquis, afin d’accompagner au mieux l’ensemble des apprenants concernés.
N.F
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