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Curepipe, entre brume et lumière : Une ville au riche heritage
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Curepipe, entre brume et lumière : Une ville au riche heritage

© Rishi Etwaroo /Archives
De halte pour diligences à ville pionnière, Curepipe s’est bâti une réputation à part dans l’histoire mauricienne.
Derrière ses vieilles bâtisses et ses noms emblématiques, se cache un riche patrimoine que le temps peine à effacer.
Connue comme l’une des régions les plus fraîches du pays en raison de son altitude, Curepipe s’écrivait à l’origine Curepipe. Au fil du temps, le trait d’union a disparu. La ville s’est d’abord illustrée comme un arrêt incontournable pour la diligence reliant Port-Louis à Mahébourg en 1860. C’était l’occasion pour le cocher d’échanger ses chevaux fatigués contre d’autres, plus vaillants, pour achever la traversée du pays.
■ La statue du «Soldat inconnu» devant le Collège Royal commémore les Mauriciens morts lors de la Première Guerre mondiale.
Selon les historiens, cette halte profitait autant aux cochers et à leurs montures qu’aux passagers, qui pouvaient se restaurer dans une auberge locale. Les fumeurs en profitaient aussi pour curer leur pipe, ce qui, selon certains récits, aurait inspiré le nom de la ville. En 1860, une épidémie de malaria frappe durement le pays, faisant plus de 30 000 morts. Les habitants de Port-Louis, particulièrement touchés, se réfugient alors dans des régions plus fraîches comme Curepipe.
Le développement des transports, notamment la ligne de chemin de fer, favorise l’installation de nouveaux habitants. Il fallait désormais 1 h 10 pour rallier Port-Louis à Curepipe, contre trois à quatre heures par diligence. À la fin du XIXe siècle, Curepipe devient une ville prisée par les familles aisées. Avec son climat tempéré, elle offrait un refuge contre les fièvres et les moustiques. La petite localité grandit vite : elle fut la première ville mauricienne à être électrifiée en 1889. Un an plus tard, elle obtient le statut de ville et voit naître son conseil administratif, dirigé par sir Virgil Naz.
■ La Malmaison de Moka, démontée et remontée, est devenue l’hôtel de ville avec sa salle des fêtes.
Les Curepipiens découvrent le plaisir de flâner en famille dans le jardin botanique de la route du Jardin, encore apprécié aujourd’hui. À l’époque, des régiments de la Caserne donnaient des concerts sous le kiosque à l’entrée, attirant la foule. En 1872, une belle demeure coloniale est bâtie par Louis de Rochecouste, puis transmise à son gendre Maxime Guimbeau. Les Aubineaux, aujourd’hui musée, restaurant et salon de thé, continue de séduire les visiteurs. La même année, l’église Sainte-Thérèse d’Avila, de style néo-roman, voit le jour. Toujours aussi fréquentée, elle a même accueilli le Pape JeanPaul II lors de sa visite en 1989.
Dans les années 1870, le conseil administratif transforme un terrain en friche, situé face à l’église, en jardin public, autour duquel seront édifiés des bureaux administratifs, une bibliothèque et un hôtel de ville. Cet édifice en bois provenait de la demeure coloniale La Malmaison de Moka, démontée et remontée à Curepipe. L’hôtel de ville, avec sa salle des fêtes et son jardin, est inauguré en 1902.
■ Le Domaine des Aubineaux, devenu musée, restaurant et salon de thé.
La bibliothèque Carnegie, voisine de l’hôtel de ville, est érigée en 1917 dans un style néoclassique anglais par les architectes Hall, Langlois et Genève, grâce à un don de la fondation Carnegie de New York. Elle accueille notamment la collection historique de Maurice issue du fonds Rouillard, ainsi que celle de Prosper d’Épinay, acquise après son décès en 1919.
Côté culte, les militaires britanniques des Casernes de Curepipe souhaitaient un lieu de prière. En 1878, le diocèse anglican construit l’église Saint-Clément, unique église en bois de l’île. Pour l’éducation, c’est le Collège Royal de Curepipe qui voit le jour, conçu selon les plans de l’ingénieur Le Juge de Segrais, inspirés du Palais de Buckingham, d’où son surnom : le Petit Buckingham. Le bâtiment en pierre est inauguré en 1914. Après la Première Guerre mondiale, le monument aux Mauriciens morts au combat est installé devant son entrée.
■ Un terrain en friche face à l’église a été transformé en jardin public.
Parmi les grandes infrastructures d’inspiration européenne, on peut citer le magasin de M. Guillemin, comparé à un grand magasin parisien du Louvre. Transformé en hôtel Vatel en 1945, il est aujourd’hui connu sous le nom d’Arcades Currimjee, sur la route Royale.
Curepipe se distingue aussi par ses nombreuses innovations. Elle a accueilli les premiers appartements de l’île, la première station de radio (MBS), la première chaîne de télévision (MBC en 1966), et a vu défiler la princesse Margaret, Pelé ou encore Jean-Paul Belmondo dans ses rues. C’est aussi ici qu’ont été inaugurés le premier cinéma parlant (Pathé Palace), la première grande surface (Prisunic), le premier stade international (Stade Georges V) et le premier fast-food (Kentucky Fried Chicken).
Aussi, le Trou-aux-Cerfs est un ancien volcan offrant, depuis son sommet, une vue spectaculaire sur une grande partie du nordouest de l’île. Ce site unique fut autrefois la demeure d’Hector Lavignac, botaniste et horticulteur passionné. Il y introduisit plusieurs variétés de canne à sucre en provenance de Nouvelle-Calédonie et entreprit même la culture de vignes sur les pentes du cratère, avec l’accord de sir Virgil Naz.
■ L’église de SainteThérèse d’Avila a accueilli le pape Jean-Paul II en 1989.
Enfin, difficile d’évoquer Curepipe sans parler de ses gares au nom singulier : Jan Palach. Ce Tchèque, étudiant en philosophie à Prague, s’immola par le feu en 1969 pour dénoncer l’occupation soviétique et le répressif Printemps de Prague. Son sacrifice, immortalisé à Curepipe, témoigne de l’attachement de la ville à des valeurs fortes. Aujourd’hui, malgré des façades en déclin, Curepipe demeure une ville à l’histoire dense et précieuse, jalonnée de trésors cachés.
Sources : Les œuvres de Thierry de Comarmond, Jean-Baptiste Urbini et Jean-François Sookahet et Wikipédia.
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