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Taux directeur À 4,5 %

Coup dur pour les emprunteurs

6 février 2025, 15:30

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Coup dur pour les emprunteurs

Il faut s’attendre à ce que des emprunteurs déboursent plus pour rembourser leurs prêts bancaires après la hausse de 50 points de base du taux directeur à 4,5 % par le Monetary Policy Committee (MPC). Pour cause, les prêts à taux d’intérêt variable, qui seront ajustés en conséquence. Avec un Prime Lending Rate (PLR ) de 6 % à 7 % affiché actuellement, il faut ajouter 50 points de base, qui sur un prêt de Rs 1 million ou plus, pourrait représenter une charge financière additionnelle conséquente. À titre d’indication, pour un prêt de Rs 1 million sur une période de 25 ans, il faudra débourser Rs 300 de plus alors que sur un montant de Rs 3 millions, étalé sur la même période, ce sera Rs 1 000 en plus.

Sans doute, il faut s’attendre à ce que des associations et autres forces vives du pays montent au créneau prochainement pour critiquer l’ampleur de cette hausse du key rate et son impact sur certains ménages, ayant des prêts à long terme, qui se verront en conséquence financièrement fragilisés, voire endettés. Tout comme les entreprises qui verront le servicing de leurs dettes auprès des banques et autres institutions financières grimper. Cela, dans la mesure où les secteurs de la manufacture, de la construction et de l’hôtellerie ont, à ce jour, un endettement combiné supérieur à Rs 100 milliards, selon les statistiques de la Banque de Maurice (BoM).

Kevin Ramkaloan, Chief Executive Officer (CEO) de Business Mauritius, l’instance suprême du secteur privé, trouve qu’il est tout à fait rationnel que la BoM aligne son taux d’intérêt sur celui de la Bank of England. Toutefois, il estime qu’il faudra en même temps «avoir des discussions élargies sur the cost and the ease of doing business à Maurice, alors même que le coût de la main-d’œuvre a augmenté de 40 %, l’année dernière, avec des augmentations et différents ajustements salariaux».

Pour sa part, un analyste financier, qui a souhaité garder l’anonymat, s’étonne de la décision du MPC. «Sur la base de l’état de l’économie , on aurait pu s’attendre à ce que le focus soit davantage sur la croissance et la reconstruction de l’économie. Or, c’est le coût de la dette publique qui va maintenant augmenter. Car à la fin de la journée, ce sont les entreprises et les ménages, disposant de prêts de longue durée, qui subiront les effets de la hausse des taux, en dépit du fait qu’on se trouve dans une période d’inflation gérable.»

Équilibre à trouver

La hausse du taux directeur trouve toutefois des échos favorables parmi d’autres spécialistes financiers. «Rama Sithanen n’avait pas une grande marge de manœuvre par rapport à la décision prise par le MPC. Il y avait un équilibre à trouver entre le renforcement de la roupie, la maîtrise de l’inflation et l’économie réelle. Il a pris la décision qui s’impose face aux impératifs économiques actuels», souligne un cambiste sur la place.

Selon lui, cette décision du MPC vise plusieurs objectifs. D’abord, encourager l’épargne avec un taux qui dépassera 3 % contre 2,9 % actuellement pour se rapprocher légèrement du taux d’inflation actuel. Ensuite, réduire le différentiel entre le taux d’intérêt sur la roupie et celui sur le dépôt en dollars, qui s’élève à 4,5 %. Enfin créer un climat de confiance en faveur d’un renforcement de la roupie vis-àvis du dollar américain. À cet effet, la roupie a gagné 26 sous face au dollar hier, selon le taux de change affiché par la BoM. Il s’échangeait à Rs 47,16 contre Rs 47,42 mardi.

Est-ce l’effet de la décision du MPC ? Selon certains observateurs, au-delà des chiffres, c’est surtout le signal fort envoyé à la communauté des affaires que la BoM «means business», qui doit retenir l’attention. «Il faudra voir et s’assurer après cette hausse du key rate que le mécanisme de transmission fonctionne pleinement pour que les résultats soient visibles. Après trois mois, on verra alors, sur la base des objectifs visés par la banque, si une légère hausse est nécessaire», insiste le cambiste.

Reste la disponibilité des devises étrangères, plus particulièrement le dollar, sur le marché forex. Rama Sithanen souligne que depuis la dernière réunion du MPC en septembre dernier, la BoM est intervenu sur ce marché à hauteur de USD 120 millions, outre des mesures pour contenir la dépréciation accélérée de la roupie depuis la mi-novembre. «On ne peut, du jour au lendemain, éliminer un sentiment du marché qui perdure depuis des années que la roupie est condamnée à se déprécier. Il faudra que notre monnaie locale regagne la confiance de nos opérateurs, ceux détenant des millions de dollars en devises, pour accepter de jouer le jeu. La hausse du taux directeur va certainement les faire réfléchir.»

En attendant, la BoM compte rencontrer les directeurs de banques, ainsi que les CEO des principaux conglomérats dans les jours à venir pour transmettre le même message.

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