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Prévention du suicide chez les jeunes
Comprendre, identifier et intervenir
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Prévention du suicide chez les jeunes
Comprendre, identifier et intervenir

Le 17 février, une collégienne a été prise en charge de justesse alors qu’elle se préparait à commettre l’irréparable, comme l’avait fait l’une de ses camarades. Cette tentative de suicide a été déjouée grâce aux enquêtes menées par des psychologues du ministère de l’Éducation, qui avaient été dépêchés en guise de soutien au collège, ainsi que par les policiers de la Brigade pour la protection de la famille, de la Child Development Unit et de l’IT Unit de la police, entre autres unités concernées, depuis le décès tragique de l’adolescente de 15 ans du pont sir Anerood Jugnauth.
Le suicide chez les jeunes constitue l’un des défis les plus préoccupants de notre société actuelle. Ce phénomène complexe, souvent sous-estimé ou mal compris, touche un nombre croissant de jeunes à travers le monde. Les facteurs en jeu sont multiples et varient d’un individu à l’autre : problèmes familiaux, pressions scolaires, mal-être psychologique, cyber harcèlement, isolement social et même des troubles liés à l’identité. La dépression et l’anxiété sont souvent des terrains fertiles pour ces pensées suicidaires, exacerbées par un manque de soutien émotionnel et de ressources adaptées à leurs besoins.
Questions à... Joolia NOORIE, «clinical psychologist» au ministère de la Santé
«Il est crucial d’écouter sans juger, d’encadrer l’adolescent (…) et ne surtout pas le laisser seul»
Quels sont les facteurs psychologiques, sociaux et environnementaux susceptibles de contribuer au risque de suicide chez les adolescents ?
Certains facteurs psychologiques incluent notamment un manque d’estime de soi, une mauvaise image de soi ou encore un déficit de confiance en soi. La personnalité de l’individu joue également un rôle important, car elle détermine la manière dont il ou elle réagira face à une situation donnée et à la recherche d’une solution adéquate. L’évolution de l’identité personnelle et la capacité à s’adapter à de nouvelles situations sont des éléments clés dans ce processus. En outre, un manque de soutien parental, une famille dysfonctionnelle, la pression des pairs, le harcèlement scolaire, les échecs scolaires, la performance académique en fonction des attentes des parents, ainsi que l’exposition précoce aux réseaux sociaux sans supervision parentale constituent des facteurs environnementaux influençant fortement le risque suicidaire.
Y a-t-il des signes précurseurs spécifiques qui indiquent qu’un adolescent pourrait être à risque ?
Oui, certains signes de changement comportemental peuvent indiquer un risque accru. Par exemple, une baisse de motivation, une perte d’intérêt pour les activités autrefois appréciées, des troubles du sommeil, une diminution de l’appétit, une chute des performances scolaires et un isolement social marquent souvent le début d’une crise. L’adolescent peut également se montrer moins communicatif, évitant de partager ses sentiments.
Comment les changements hormonaux et la puberté influencent-ils la santé mentale des adolescents en relation avec le suicide ?
Les transformations hormonales affectent le fonctionnement physique, émotionnel et psychologique des adolescents. Durant la puberté, le corps subit de nombreux changements, et l’adolescent doit apprendre à accepter et à s’adapter à cette nouvelle réalité, ainsi qu’à sa nouvelle identité. L’interaction avec les autres évolue également et cette période de transition n’est souvent pas accompagnée d’un soutien parental suffisant, rendant la situation encore plus difficile à gérer. Les pressions extérieures, telles que les exigences des parents, de la famille ou des amis, augmentent le stress et peuvent nourrir des pensées suicidaires chez l’adolescent.
Le harcèlement scolaire, l’isolement social ou les problèmes familiaux jouent-ils un rôle important dans les pensées suicidaires ?
Oui, ces facteurs jouent un rôle central dans l’émergence de pensées suicidaires. Le harcèlement scolaire se caractérise par des agressions physiques, verbales ou émotionnelles répétées, engendrant peur et anxiété. Cela peut conduire l’adolescent à s’isoler, à refuser de se rendre à l’école et à perdre ses amis, ce qui fragilise considérablement son estime de soi. La pression sociale et l’isolement amplifient les pensées négatives et suicidaires. De plus, les problèmes familiaux, notamment la monoparentalité, les divorces ou les familles recomposées, ainsi que la violence domestique, affectent le développement émotionnel de l’adolescent, surtout lorsqu’il manque de soutien parental. L’absence de communication et l’incapacité de trouver un soutien affectif contribuent à la dégradation de sa santé mentale.
Le développement de l’estime de soi et la pression des pairs peuvent-ils être des facteurs déclencheurs ?
Oui, un faible niveau d’estime de soi peut rendre l’adolescent plus vulnérable face à des situations difficiles. Sans une identité solide, il sera plus susceptible de se laisser submerger par l’anxiété et de développer des pensées négatives. Le manque de confiance en soi rend également difficile l’expression des sentiments et la création de liens amicaux, ce qui peut accroître le risque de pensées suicidaires. Par ailleurs, la pression exercée par les pairs est un facteur déterminant. L’adolescent, dans sa quête de validation sociale, peut se retrouver dans une situation où il se sent exclu ou inadéquat, ce qui nourrit des pensées de rejet et d’échec. L’incapacité à gérer cette pression peut effectivement augmenter le risque de suicide.
Quels sont les moyens de prévention les plus efficaces pour réduire le risque de suicide chez les adolescents ?
Les campagnes de sensibilisation sont un moyen efficace pour détecter les premiers signes de détresse chez les adolescents. Elles doivent inclure non seulement le personnel enseignant, mais aussi les parents, afin qu’ils puissent intervenir rapidement en offrant le soutien nécessaire. Il est également essentiel de former les parents pour les aider à mieux gérer la crise de l’adolescence et à renforcer les liens familiaux. Des programmes de formation ciblés peuvent être proposés pour accompagner les parents dans cette démarche.
Comment les parents et les éducateurs peuvent-ils repérer les signes d’alerte d’un adolescent en détresse ?
Les parents peuvent observer un changement dans le comportement de leur enfant, comme une baisse des performances scolaires, un désintérêt pour les activités précédemment appréciées, des troubles du sommeil et de l’appétit, ainsi qu’un isolement croissant. L’adolescent pourrait aussi passer de plus en plus de temps seul, notamment dans sa chambre, dans le noir, et refuser de parler ou de partager ses pensées. De plus, une irritabilité sans raison apparente est un autre signe d’alerte. Quant aux enseignants, ils peuvent repérer une chute des performances académiques, une tendance à s’isoler ou un refus de participer aux activités scolaires. Des troubles du comportement peuvent également être des indicateurs importants.
Quelles sont les stratégies à mettre en place dans les écoles pour prévenir ce problème ?
Les écoles doivent organiser régulièrement des campagnes de sensibilisation pour aider les adolescents à reconnaître les signes de détresse et les encourager à demander de l’aide. Les enseignants doivent être formés pour mieux identifier les changements dans le comportement des étudiants et être capables de solliciter de l’aide de manière appropriée. Il est aussi essentiel de garantir la présence régulière de psychologues scolaires et de normaliser l’accès aux services de soutien psychologique, afin de lutter contre la stigmatisation de la santé mentale. La santé mentale de l’adolescent est aussi cruciale que sa santé physique.
Quels types de thérapies ou d’accompagnements sont recommandés ?
La thérapie individuelle permet de travailler directement avec l’adolescent sur ses émotions, ses peurs, son estime de soi et sa gestion des problèmes quotidiens. Par ailleurs, la thérapie familiale est souvent nécessaire, car un encadrement familial solide est essentiel pour assurer un soutien à long terme et offrir à l’adolescent un environnement protecteur et sécurisé.
Comment intervenir lorsqu’un adolescent exprime ouvertement son intention de mettre fin à ses jours ?
Il est crucial d’écouter sans juger et d’encadrer l’adolescent avec bienveillance. Il ne faut surtout pas le laisser seul et il convient d’informer immédiatement les parents. Un professionnel de santé doit être contacté pour fournir un traitement et un accompagnement approprié.
Existe-t-il des programmes de prévention spécifiquement adaptés à des populations d’adolescents par le ministère de la santé ?
Les campagnes de prévention visent généralement la population dans son ensemble, y compris les adolescents. Des services tels que Lifeplus sont également disponibles pour les adolescents et les jeunes adultes ayant des pensées suicidaires, afin de leur offrir un soutien spécifique.
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