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Rehana Ameer : « Je n’ai aucune amertume envers Dan Callikan »
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Rehana Ameer : « Je n’ai aucune amertume envers Dan Callikan »

? Samedi dernier, vous étiez au plus près de la victoire, puis, lundi, on repart de zéro. Comment vous sentez-vous après ce revirement de situation ?
Cela me fait très mal car nous sommes, effectivement, retournés à la case départ. Et je ne comprends pas pourquoi.
? Mais c’est évident, c’est parce que la MBC ne veut pas de vous...
Je ne sais pas.
? Pour quelqu’un qui a mené une telle bataille, je vous trouve très peu volubile !
(Rires…) C’est que je trouve cette situation exaspérante.
? Votre réintégration ne semble pas possible mais vous vous entêtez...
J’ai été injustement licenciée. C’est mon droit en tant que citoyenne de me battre pour mes droits. Je n’ai pas vu le rapport Vellien mais je sais que je n’ai rien fait de mal. On m’accuse d’avoir écrit une lettre anonyme mais je ne l’ai pas fait !
? Que vous ayez raison ou tort, la réintégration ne peut pas se faire si l’employeur ne veut pas...
Oui, mais nous savons que c’est une loi bancale. Vous trouvez normal que, malgré le fait que je n’ai pas commis de faute, l’employeur vient dire qu’il ne veut pas de moi ? Et pourquoi ne voudrait-il pas de moi ? Comment un tel argument peut tenir la route quand je n’ai rien fait de mal ?
? C’est cette loi qui était applicable quand les événements qui ont mené à votre licenciement se sont passés...
(Sourire…) Je ne vais pas changer d’avis.
? On vous a offert Rs 4 millions ?
Non, il n’y a pas eu de chiffre qui a été avancé.
? Alors qu’ils sont disposés à être très généreux envers vous... Pourquoi ne pas prendre cet argent et trouver un autre travail ?
(Rires…) Pour avoir le beurre et l’argent du beurre ? Non. Vous savez, dès ma suspension, je n’ai dit qu’une seule chose et je suis restée constante dans mes demandes. C’est une lutte pour la justice que je mène. Pour un principe. Une compensation ne va pas me redonner ma dignité. Pendant un an, j’ai subi beaucoup de pressions, que ce soit sur les plans personnel ou financier. Je suis passée par les moments les plus difficiles de ma vie et ce n’est pas une question d’argent. Je trouve extraordinaire qu’aujourd’hui, on veuille me dédommager alors que, quand on m’avait mise à la porte, il n’était pas question de compensation et on m’avait ordonné de repayer mes dettes !
? Mais cette lutte vous l’avez gagnée ! Le rapport Vellien est venu vous donner raison. Vous l’avez retrouvée, votre dignité...
(Haussement d’épaules)
? Sérieusement, vous voyez-vous réintégrée à la MBC, dans un environnement hostile, avec les risques de victimisation de la direction et du «board» ?
Oui. Je pose une question : le rapport Vellien a trouvé que les torts sont partagés. Dans ce cas-là, pourquoi est-ce que c’est moi qui dois payer les pots cassés ? Vous savez, après toutes les épreuves que j’ai subies, retourner à la MBC ne me fait pas peur. J’y ai travaillé pendant 25 ans et n’oubliez pas que pendant ce temps, la MBC a changé plusieurs fois de direction.
? Les nominés politiques partent, les employés restent ?
Exactement ! Et il n’y a jamais eu de problème. Mon Personal File est vide. On ne m’a jamais rien reproché. Donc, je ne vois pas pourquoi j’aurai peur. J’ai toujours été loyale envers mon employeur, la MBC. Les hommes partent, mais la MBC reste.
? Quelles étaient exactement vos fonctions à la MBC ?
Je m’occupais des publicités et faisais la liaison avec les agences de publicité et d’autres clients.
? Parlons de cette fameuse lettre anonyme. L’avez-vous écrite ?
Mais bien sûr que non ! J’ai reçu la lettre en tant que présidente de syndicat. C’était la troisième lettre anonyme mais, pour ma part, c’était la première qui m’avait été adressée. J’ai demandé à l’assistant secrétaire de classer la lettre. Je lui ai demandé de réunir tous les membres de l’exécutif pour que nous essayions d’avoir une réunion avec la direction. Pour discuter et renouer avec la direction. Vous savez, cette affaire de lettres anonymes a commencé avec les changements qui avaient eu lieu à la MBC changements auxquels beaucoup s’opposaient.
La position du syndicat était que des changements étaient nécessaires oui, mais qu’ils ne devaient pas faire souffrir les gens. Qu’il fallait que cela se fasse dans le dialogue. C’était cela le but. J’ai comme l’impression que cette affaire de lettre anonyme est bien tombée puisque, après cela, il n’y a plus eu de réunions !
? Vous attendez une rencontre avec le Premier ministre ?
Oui, c’est Deepak Benydin qui a fait la requête à Suresh Seeballuck. Ce dernier a dit qu’il allait nous tenir au courant de la situation. Il avait dit que ce serait jusqu’à la fin de la semaine et on n’a rien entendu jusqu’ici. Je quitte le pays aujourd’hui pour une conférence du Bureau international du travail (BIT) et j’entamerai une grève de la faim le 9 décembre. Mes amis Jack Bizlall et JaneRaggoo se mettront aussi en grève par solidarité.
? Est-ce sérieux cette fois-ci ? Cela fait un moment que vous en parlez...
Oui, c’est vrai que j’en parle depuis l’année dernière. Mais je ne l’ai pas fait parce que je voulais continuer à croire dans les institutions. Mais j’ai vu que les institutions ne pouvaient pas fonctionner. Et là, il n’y a plus aucune raison pourquoi ne pas aller de l’avant.
? Cette grève de la faim, c’est une forme de chantage ?
Non, ce n’est pas du chantage. C’est mon dernier recours. Je ne sais plus à quelle autre porte frapper. On me dit qu’il n’y a pas de réintégration dans la loi mais me poster dans un corps parapublic est une forme de réintégration. Donc, si on peut me réintégrer alors pourquoi pas à la MBC ?
? Si vous commencez une grève de la fin et qu’on essaie de vous raisonneren vous faisant d’autres offres, mais pas celle de réintégrer la MBC, qu’allez- vous faire ?
J’irai jusqu’au bout de ma grève de la faim.
? Avec tous les dangers que cela comporte ?
Oui. Je sais ce que vous voulez dire et je sais ce que je dis.
? Que souhaitez-vous que l’on retienne de tout ce qui s’est passé ?
Que nos lois ne protègent pas les travailleurs. Que quand un employé connaît ce genre de difficultés, il ne baisse pas les bras et persévère pour forcer les autorités à réagir. Que les syndicalistes luttent pour leurs membres. Sans relâche.
? Justement, le ministre du Travail dit que vous avez eu un traitement privilégié à cause de vos relations syndicales et que des centaines d’autres travailleurs licenciés injustement n’ont eu pas eu votre chance...
Mon cas n’aurait pas été vulgarisé à ce point si le directeur de la MBC ne m’avait pas consacré 17 minutes, puis 7 minutes de son bulletin d’information.\ Et s’il n’avait pas envoyé un communiqué à toute la presse pour annoncer ma suspension.
? Justement quand vous pensez à Dan Callikan, que vous inspire-t-il ?
Rien. Je n’ai pas d’amertume par rapport à lui, sinon je n’aurai pas pu mener ce combat. Mais, aujourd’hui, ma satisfaction c’est que tout le monde sait que la MBC a mal agi, qu’il y a eu vice de procédure et, pour cela, j’en suis infiniment reconnaissante à Denis Vellien.
Propos recueillis par Deepa Bookhun
(Source : l’express, samedi 19 novembre)
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