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Prévenir les abus sexuels : la responsabilité de tous
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Prévenir les abus sexuels : la responsabilité de tous

La page Facebook Pédostop Maurice est venue rappeler que se taire c’est être complice et que chacun a son rôle à jouer dans la prévention des abus sexuels et dans l’assistance aux victimes. Les conseils pratiques de Mélanie Vigier de Latour-Bérenger, psychosociologue.
Différentes formes d’abus sexuel
Les abus sexuels sont des activités sexuelles inappropriées à l’âge et au développement psychosexuel de l’enfant qu’il subit par contrainte, violence ou séduction et qui transgressent les tabous sociaux. Les abus sexuels peuvent prendre différentes formes, dont le viol et l’inceste, mais aussi les appels téléphoniques obscènes, le voyeurisme, la présentation d’images obscènes, les rapports ou tentatives de rapports sexuels (anaux, buccaux, vaginaux), la prostitution des mineurs, les attouchements, la masturbation forcée, l’exhibition des organes sexuels, l’exhibition de relations sexuelles devant un enfant.
Les conséquences sont graves et ont un impact à long terme, d’où la nécessité de prendre vraiment en considération la gravité d’un abus sexuel, quelle que soit la forme de l’abus.
* Plus d’infos sur la page Facebook Pedostop Maurice http://www.facebook.com/PedostopContreLaPedophilieAMaurice  et par mail : pedostop@gmail.com
Des écoutants dans les collèges du BEC
Abus sexuels, tentative de suicide, violence à la maison ou à l’école, trafic de drogue… autant de situations auxquelles les jeunes peuvent être confrontés, sans avoir personne autour d’eux pour se confi er. L’Institut Cardinal Jean Margéot a donc lancé, en 2006, un service gratuit de Counselling de proximité, dans les collèges du BEC (Bureau d’éducation catholique) et dans d’autres institutions. Aujourd’hui, 26 conseillers travaillent dans 21 centres d’écoute. Les écoutants bénéficient d’une formation de 250 heures et d’un manuel avec les numéros des hotlines des services sociaux. Ils savent parfaitement quels cas concrets dépassent leurs compétences.
Et ils peuvent toujours joindre les psychologues, comme Mélanie Vigier de Latour-Bérenger, qui font le suivi des dossiers et réfèrent au besoin les cas les plus préoccupants à la «Child Development Unit».
Lever les tabous sur la sexualité
La meilleure façon de prévenir les abus sexuels, c’est d’en parler avec son enfant. C’est une question de bon sens, pourtant pour passer de la théorie à la pratique, parfois les parents butent. «La sexualité est une composante essentielle de la vie, c’est donc important de donner quelques indices du développement sexuel à son enfant. Dès deux ans et demi, on peut déjà lui parler de son sexe qu’il commence à découvrir. Et surtout il faut lui faire comprendre qu’il ne doit pas toucher les organes sexuels des autres, ni les laisser toucher par autrui. Avant 6 ans, la notion de ce qui est «dans la norme» ou pas, n’est pas encore intégré chez l’enfant. Or, l’abuseur va lui dire que ce qu’il lui fait subir est permis, d’où le danger de confusion pour l’enfant entre le bien et le mal et le risque qu’il accepte les gestes malsains du pédophile», explique Mélanie Vigier de Latour-Bérenger.
• Site internet pour aider les parents à parler de sexualité : http://www.onnetouchepasici.org 
Phrases-clés :
« Ton corps t’appartient. Personne n’a le droit de toucher ton corps ou ton sexe »
« Personne n’a le droit de t’obliger à le, à la caresser »
Aménager des espaces de parole
Pris par leur journée à rallonge, entre les temps de transport dans les embouteillages, les courses au supermarché, la cuisine, les soucis du travail… les parents ont tendance à déléguer aux nounous les soins des enfants… et tout le reste des conversations avec. « Déjà, il est impératif de ne pas confier son enfant à n’importe qui et s’il est petit de continuer à lui donner son bain soi même, pour s’assurer qu’il n’est pas la victime de violence physique et éventuellement sexuelle. Ensuite, il est primordial que les parents sachent aménager des temps de parole avec l’enfant, pas forcément pour parler de sexualité, mais sur tout pour que l’enfant ait un espace pour « se dire ». Dès la petite enfance, les parents doivent échanger avec l’enfant sur les bons et les mauvais moments de sa journée… Si l’enfant a l’habitude de se confi er avec au moins un de ses deux parents, ce sera plus facile de parler ensemble de sexualité ou de révéler un abus. Mais surtout il faut devancer les questions des enfants sur la sexualité et l’informer même en l’absence d’interrogations franches. Et il est essentiel de le faire avec des mots clairs et précis », précise Mélanie Vigier de Latour-Bérenger.
Croire la victime et la déculpabiliser
Certains abus sexuels ne laissent pas de trace physique, ni de preuve, mais ils ne doivent surtout pas être ignorés ou minimisés pour autant ! «Même un baiser forcé constitue un abus ! Le parent non abuseur ou l’entourage doit valider la parole de l’enfant, cela revêt une importance capitale !», insiste Mélanie Vigier de Latour-Bérenger, «souvent l’entourage est incrédule, car ce que l’enfant dénonce est de l’ordre de l’absurde, de l’impensable. Par exemple : comment son oncle a pu le/la violer ou lui faire regarder un fi lm pornographique ? Mais quand l’enfant raconte les faits avec ses mots et que cela dépasse ce qu’un enfant du même âge a comme expérience de la sexualité, il faut le croire car il n’a pas pu inventer ce qu’il raconte. »
Mais dans les abus sexuels, la pression du secret et la culpabilité pèsent contre la révélation. «L’abuseur insiste pour que l’enfant garde le secret en le menaçant (représailles, risque de briser la famille, menace de l’emprisonnement…). Le pédophile peut faire croire également à l’enfant, qu’il est à l’origine de la séduction et qu’il a cherché ce qui lui arrive. Ce qui est bien entendu complètement faux. Par ailleurs, dans les rapports sexuels forcés, si l’enfant éprouve du plaisir, cela peut renforcer son sentiment de culpabilité. L’accompagnement psychologique par un expert professionnel est donc fortement conseillé», soutient Mélanie Vigier de Latour-Bérenger.
Phrases-clés :
« La situation est difficile, mais tu n’es pas coupable. Ce n’est pas ta faute. »
« La pédophilie est un crime, l’abuseur n’avait pas le droit de faire cela. C’est illégal.»
« Je suis là pour t’aider »
Alerter les structures légales
? Child Development Unit : hotline 113 (24h sur 24 et 7 jours sur 7)
? Bureau de l’Ombudsperson for Children : green line 177 (du lundi au vendredi de 9h à 16h)
Décoder les signes
Tout changement brutal de comportement à la maison ou à l’école doit être pris au sérieux. «Les victimes d’abus sexuels peuvent lancer des messages inconscients ou utiliser un double langage. Par exemple, un enfant peut refuser d’aller en visite chez quelqu’un ou de faire la bise à un proche… ce qui doit alerter l’attention. Il faut savoir que dans 70 % des cas, l’abuseur est dans le cercle restreint de l’enfant : père, oncle, professeur, nounou, voisin, ami de la famille… Il peut s’agir d’une femme et pas forcément d’un homme», met en garde Mélanie Vigier de Latour-Bérenger
Quelques comportements à surveiller chez l’enfant :
? Troubles du sommeil et état de tension même en dormant
? Manque de confiance dans les adultes en général
? Enurésie chez un enfant qui était propre
? Masturbation excessive
? Attitude hypersexuée et pratiques sexuelles en décalage avec son âge
? Lavage répétitif
? Retard de développement
? Chez les adolescents : mal au ventre, fugue, tentative de suicide
Les examens médicaux et le suivi de la victime
Faire examiner et soigner les blessures physiques et les troubles psychologiques de la victime est une priorité. Le rapport médical pourra servir de preuves lors de la procédure judiciaire, mais il existe rarement des preuves physiques en cas d’abus sexuels.
Par ailleurs, un traitement post-exposition pour éviter l’infection par le VIH doit être pris dans les heures suivant le rapport sexuel. Ce traitement est disponible gratuitement dans tous les hôpitaux publics.
En cas de rapport sexuel non protégé (y compris en l’absence de pénétration), faire un test de dépistage du VIH Sida est conseillé, après la période fenêtre de trois mois. Plus de renseignements sur les situations à risque et les lieux de dépistage en appelant Sida info au 89.99.
A savoir : les pharmaciens délivrent la pilule du lendemain, notamment pour éviter les grossesses non désirées suite à un viol. Plus d’infos sur la contraception d’urgence en appelant la «Mauritius Family Planning and Welfare Association » (MFPWA) tel : 211.4101
Quant au suivi psychologique, il fait partie du travail sur soi incontournable pour essayer de surmonter l’épreuve terrible, que constitue un abus sexuel. «Personne n’oublie un abus sexuel, mais pour aller au-delà et se reconstruire, il faut mettre en mots sa souffrance. Cela passe par un accompagnement psychologique et l’aide d’un psychologue professionnel. Et il faut espérer qu’en travaillant sur soi, en dénonçant l’abuseur qui lui est alors reconnu comme coupable et responsable, une victime peut transformer cette blessure en cicatrice, mais chacun a son histoire et va au-delà de cette épreuve selon sa personnalité, l’aide de son environnement, le travail psychologique etc.», concède Mélanie Vigier de Latour-Bérenger.
* Info sur le traitement Post-Exposition contre le VIH : http://www.pils.mu/vih-sida/le-traitement-postexposition.html
Le jugement, étape cruciale de la réhabilitation
Les abus sexuels constituent des crimes. L’impunité nuit psychologiquement à la victime et encourage la récidive du pédophile.
« Il n’est pas suffisant d’éloigner la victime de l’abuseur, il faut également porter plainte. L’absence de traitement judiciaire pourrait correspondre à un désaveu de la réalité de l’abus par la famille. Et ne pas poursuivre met en danger les autres enfants, que l’abuseur côtoie », souligne Mélanie Vigier de Latour-Bérenger. Mais même en cas de condamnation, la question de la récidive à la sortie de prison reste posée.
« A Maurice, les abuseurs sont emprisonnés. En plus de l’incarcération, un accompagnement psychologique du coupable est primordial. D’autres solutions existent, par exemple, le Canada applique la castration chimique des pédophiles, avec leur accord. Des médicaments abaissent alors leurs pulsions sexuelles et la méthode est efficace dans 95% des cas. Il faudrait, sans doute, étudier cette piste à Maurice », conclut Mélanie de Latour-Bérenger.
 
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