Des problèmes de santé peuvent compromettre la scolarité d’un enfant, surtout quand ils ne sont pas diagnostiqués à temps. Partant de cette évidence, le réseau ANFEN a sollicité le Docteur Farida Oodally et l’association Diabetes Parent Support Group, afin d’examiner les adolescents scolarisés dans les 19 centres ANFEN à Maurice (et bientôt les élèves de la Maison Familiale de Rodrigues). 829 adolescents ont ainsi pu bénéficier d’une consultation. Suite à ces visites, trois adolescents ont dû être référés rapidement vers un service médical : un enfant obèse souffrait d’hypertension artérielle et deux élèves avaient un taux élevé de glycémie, dont un nécessitait une admission à l’hôpital. 

D’autres enfants souffrant de maladies diagnostiqués n’avaient pas le traitement approprié. « Certains enfants avec du diabète ou un problème lourd d’acuité visuelle décelés n’avaient pas bénéficié d’un suivi médical. Les parents ont évoqué la peur face à au diagnostic d’une maladie, pourtant traitable, ou le manque de moyens financiers pour payer le bus jusqu’à l’hôpital », s’étonne le Docteur Farida Oodally.

Lors de la visite médicale et de l’entretien avec les parents, le Docteur Farida Oodally a cherché à cerner les facteurs de l’échec scolaire. « La plupart des élèves ont réussi à analyser les raisons derrière, comme les problèmes d’apprentissage de l’alphabet et de la lecture, les difficultés avec l’anglais, le changement fréquent d’écoles, voire une non-scolarisation ou une scolarisation tardive pour un petit nombre d’enfants. En outre, certains adolescents souffrant d’obésité ou de petite taille avouent que les moqueries des autres élèves les ont démotivés et mis à l’écart dans la classe jusqu’à la sortie du mainstream. Le sentiment d’avoir été mis sur la touche au sein de leur classe en primaire est très fort parmi les adolescents des centres ANFEN », regrette le Docteur Farida Oodally. Elle souhaiterait qu’une recherche plus approfondie sur les causes de l’échec scolaire soit entreprise.

Suivi psychologique

D’autres examens médicaux vont être effectués à la charge du réseau ANFEN. L’association ayant bénéficié d’un financement de la banque HSBC pour l’ensemble du projet.

« Parmi les enfants examinés, 7,1% souffrent d’obésité, 10,2% de surpoids et 23,9% ont un indice de masse corporelle inférieur au 5e percentile : le diagnostic de malnutrition ou de sous-nutrition pourrait être posé après un examen nutritionnel approfondi », précise Farida Oodally. Avec l’aide de la nutritionniste Diane Desmarais, le réseau ANFEN compte organiser également des cours sur la nutrition pour les parents et des consultations individuelles si besoin.

« Comme un enfant qui a faim ne peut pas étudier correctement, la plupart des centres offrent un petit-déjeuner et/ou un déjeuner à tous les élèves. Dorénavant, les menus seront revus par Diane Desmarais », ajoute Bernard d’Argent, coordinateur du réseau ANFEN.

Et comme la santé psychologique n’est pas laissée de côté, le réseau ANFEN offre aux jeunes et aux animateurs qui le souhaitent un suivi psychologique, depuis 8 ans. Cinq psychologues à temps partiel, interviennent dans 15 des 20 centres ANFEN.  Cette écoute est importante, car derrière chaque enfant en échec scolaire, il y a une grande souffrance et une perte de confiance en soi. Et cette écoute peut permettre de prévenir des situations aussi graves que des tentatives de suicide.

Un adolescent en danger

Vijay Ramanjooloo, psychologue travaille depuis 6 ans dans deux centres ANFEN à raison de deux journées par mois et par école : « Ces élèves sont issus de milieux sociales précaires et certains sont victimes de maltraitance physiques, voire sexuelles. Ce qui me révolte c’est la lenteur de la procédure du côté des services de protection de l’enfance, quand je détecte un cas très préoccupant… On ne peut pas attendre 6 mois pour retirer un enfant de sa famille s’il est en danger ! Je suis un adolescent de très près, j’ai alerté l’Ombudsperson for Children, la Child Development Unit, j’ai même médiatisé la situation en alertant Radio One, mais rien ne se passe ! Or, je n’ai pas le droit légalement d’héberger cet adolescent chez moi, et je me sens impuissant ! »

Nicolas Soopramanien, psychologue clinicien, travaille une journée par semaine dans un centre ANFEN: « Avec un élève, une thérapie peut durer plusieurs semaines à raison d’une séance par semaine ou par quinzaine. Le problème à Maurice est qu’il n’y a pas de pédopsychiatre (des spécialistes de l’enfance et de l’adolescence). Donc à qui référer les adolescents, qui ont besoin d’un traitement médicamenteux ? Dans les familles qui ont les moyens, les enfants sont soignés à la Réunion, mais pour les élèves des centres ANFEN, qui va payer la facture ? ».