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Expulsion du Slovaque Peter Uricek: l’EDB accorde-t-il des permis sans suivre ses propres procédures?
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Expulsion du Slovaque Peter Uricek: l’EDB accorde-t-il des permis sans suivre ses propres procédures?

Le renvoi virulent dans son pays de Peter Uricek ne se limite pas à l’épisode avec son avocat. Il fait s’interroger sur l’octroi de permis de résidence en amont, la façon d’expulser les étrangers, le droit et le rôle du pouvoir face à la justice…
Comment ce présumé trafiquant de drogue a-t-il pu obtenir un permis de travail à Maurice ? L’Economic Development Board (EDB) nous explique que Peter Uricek a eu son permis en 2018 comme professionnel touchant un salaire d’au moins Rs 60 000 mensuellement. Dans quel domaine ce Slovaque est-il un professionnel ? «Product Manager», répond l’EDB. Ce terme vague est-il qualifié de «professionnel» ? Est-il un ingénieur, un chimiste… ? avons-nous voulu savoir. Pas de réponse.
Quel est le nom de l’employeur qui allait embaucher le Slovaque ? Car, selon les règlements, «an application for an Occupational Permit in the Professional category should be submitted by the Employer on behalf of the Professional». La réponse d’EDB : «Euro-Cola, fabricant de boissons gazeuses.» Or, une vérification au Registrar of Companies nous permet de constater que c’est Peter Uricek lui-même qui est le directeur de la compagnie. D’ailleurs, l’avocat du Slovaque a affirmé en cour que son client «… has a business in Mauritius» et qu’il «was arrested at the company’s address»
En tout cas, Euro-Cola (Mauritius) Ltd ne respire pas la grande forme puisqu’elle a terminé l’année 2021 avec une perte de Rs 48 532, les frais administratifs ayant pris Rs 314 171 à eux seuls alors que les ventes se montaient à Rs 273 774. Euro-Cola ne serait pas seulement dans la fabrication de boissons gazeuses mais agirait aussi comme… guide touristique.
Adresse itinérante
Selon la petite amie du Slovaque, ce dernier habite «at Meldrome street, Beau-Bassin, which is also the address for the company» alors que d’après l’inspecteur Jankur, «the applicant’s official address is Résidence Océan, Péreybère, but he was untraceable thereat. According to open sourced information, the applicant was operating at Curepipe but he was untraceable. Surveillance revealed that he has also been residing in Flic en Flac and Grand Bay whilst he was arrested in Beau-Bassin». L’adresse du business d’usine ne semble donc pas tenir en place… Nous avons voulu savoir de l’EDB où se trouve l’usine. Réponse :«Allez voir sur internet.» Ce que nous avons fait. D’après le Registrar of Companies, l’usine se trouve à Curepipe. Sur la page Facebook de l’entreprise, elle est située à Beau-Bassin…
Usine de boissons gazeuses ou usine à gaz ? L’EDB fait-il un suivi pour confirmer si le bénéficiaire du permis de travail et de résidence exerce bien la profession pour laquelle il a postulé ? «Oui», nous assure-t-on. Drôle de façon de faire le suivi… L’usine est-elle entrée en opération ? Après quelques hésitations : «Oui, en 2019.» Mais on ne saura pas si l’usine a commencé à vendre sa boisson gazeuse à l’orange. Un propriétaire de supermarché nous dit qu’il n’en a jamais entendu parler.
Ce qui est plus étrange, c’est que le permis de ce Slovaque obtenu en 2018 n’était que pour neuf mois. L’EDB en affiche d’ailleurs les conditions sur son site : «Professionals may also apply for a Short-term Occupation Permit for a period not exceeding 9 months. The permit may be extended only once for a period not exceeding 3 months.» L’EDB nous confirme que Peter Uricek n’a jamais fait de demande de renouvellement de permis. Il aurait donc, tout comme les pauvres travailleurs bangladais, prolongé son séjour depuis 2018 et vivait, depuis, dans la clandestinité. Pendant lequel temps, il aurait, selon l’EDB, démarré ses activités de fabrication dans son usine que l’organisme assure avoir visité.
Plus incroyable encore, Peter Uricek aurait voyagé au Kenya en 2019, de Maurice. Donc, ni l’EDB ni le bureau des passeports et de l’immigration ne le recherchaient. Ce n’est que le 6 août 2020 que le bureau de l’Attorney General «has made a request through diplomatic channels from Slovak Republic […] for the extradition of applicant».
Casier judiciaire variable
Dans le ruling du 9 mars 2022, il est mentionné que «the applicant (NdlR, Peter Uricek) is borne on record in his own country, in Slovakia». C’est-à-dire qu’il était fiché comme un criminel. L’EDB a-t-il vérifié son casier avant de lui accorder l’Occupation Permit ? «Oui.» Pourtant, lui répondons-nous, la cour affirme qu’il n’a pas un certificat vierge. «En tout cas, en 2018, explique l’EDB, Uricek avait un casier vierge en Slovaquie». Si l’on suit ce raisonnement, Peter Uricek était blanc comme neige quand il est arrivé à Maurice et ne l’était plus (en Slovaquie) après 2018, lorsqu’il était à Maurice. Est-ce que l’EDB s’est basé sur un certificat de moralité fourni par Peter Uricek lui-même ? «Je ne peux pas vous donner ces informations sensibles», est la réponse. «Et puis, il y a une affaire devant la justice…» On ne sait donc pas si le certificat de moralité présenté éventuellement par Uricek était fiable.
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