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Abattage des chauves-souris: une fleur aux planteurs ?

29 octobre 2018, 18:00

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Abattage des chauves-souris: une fleur aux planteurs ?

Les chauves-souris pourraient passer cette année-ci au statut d’espèces en danger. C’est du moins ce qu’avance l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Le mammifère quitte désormais la catégorie des espèces «vulnérables» et est à présent en «danger». Malgré cet avertissement, l’État persiste et signe : l’abattage d’au moins 13 000 chauves-souris aura bien lieu cette année-ci. D’ailleurs, elle a débuté samedi. Pourquoi ? À l’approche des élections, et si c’était pour faire plaisir aux planteurs, qui représentent une partie non-négligeable de l’électorat ? Car il y a quelques semaines, devant la pression populaire, le gouvernement a bien cédé devant la venue d’Uber. Et a ainsi tenté de récolter la sympathie des chauffeurs de taxi…

C’est la troisième fois que le ministère de l’Agro-industrie choisit d’abattre des chauvessouris en quatre ans. Dans les milieux concernés, on a du mal à comprendre pourquoi le gouvernement choisit d’ignorer les recommandations de l’UICN. À commencer par le directeur de conservation de la Mauritius Wildlife Foundation, Vikash Tatayah.
 
Pour l’instant, le statut d’espèce «en danger» veut dire que le mammifère est confronté à un «risque très élevé» d’extinction sans compter l’abattage. Cette liste rouge de l’UICN est mondialement reconnue pour être l’outil de référence le plus fiable en ce qui concerne le niveau de menace qui pèse sur les animaux.

Pour Vikash Tatayah, si, par la suite, 20 % de la population de chauves-souris disparaît, l’UICN envisagera de changer son statut à espèce «en danger critique d’extinction.» Pourtant, le ministère de l’Agro-industrie, est au courant de l’inquiétude grandissante de l’UICN. Mais, le feu vert a été donné pour abattre les chauves-souris jusqu’à décembre.

À l’approche des législatives, est-ce une pression grandissante venant des propriétaires de vergers qui a poussé le ministre Mahen Seeruttun à prendre une telle décision ? Sunil Busguth, un planteur d’arbres fruitiers habitant Arsenal, se réjouit, lui, de la prise de position du gouvernement. «Nou tou planters bien soufer. Sa lané-la, nou pou perdi plis ki 50 % rékolt. Mo éna 3 pié mang dan lakour. Dan lespas enn semenn, sov-souri finn fini tou.» Le nombre de fruits décroissant représente un sérieux manque à gagner pour les planteurs. En ce qui concerne les letchis par exemple, Kreepalloo Sunghoon, de la Small Planters Association souligne que les premiers fruits seront vendus à Rs 10 l’unité. En outre, le prix d’un arbre peut varier entre Rs 10 000 et Rs 30 000.

Quid des alternatives comme les filets ? «Komié filé pou servi ? Li pa dirab. Sak lané pa kapav res investi ladan», soutient le quinquagénaire. Un autre planteur abonde dans le même sens.

Vikash Tatayah poursuit qu’il est donc clair que la décision de mener les abattages avait déjà été prise avant la réunion des parties prenantes, en septembre dernier. Réunion au cours de laquelle les membres ont été appelés à passer au vote.

«La MWF était la seule organisation indépendante de cette réunion», déplore le directeur de conservation de la fondation. Il ajoute que les chauves-souris sont les boucs émissaires et que des méthodes alternatives n’ont pas vraiment été testées.

Le ministre Mahen Seeruttun, lui, campe sur sa position. Contacté par l’express hier, il avance que pour lui, la décision prise était nécessaire. Il assure que toutes les recommandations ont été prises en compte. «Il ne faut pas être alarmiste. Si mo ti pensé lespes-la ménasé, mo pa ti pou fer li. Mé li pé fer tro bokou déga.»

Mahen Seeruttun soutient également qu’il a contacté à «plusieurs reprises» l’UICN dans le but de connaître le nombre en dessous duquel l’espèce sera considérée comme étant en danger critique d’extinction. «Je n’ai jamais eu de réponse.»

Comment se fait le comptage ?

<p style="text-align: justify;">Ce sont les membres de la<em> Special Mobile Force,</em> sous la supervision du <em>National Parks and Conservation Service</em>, qui procèdent au comptage des chauves-souris. Cela se fait entre 16 et 18 heures, au moment où les chauves-souris quittent le lieu qu&rsquo;ils ont choisi pour dormir au lever du jour. La méthodologie de comptage a été recommandée par la MWF.</p>

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