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Aymeric Verlet: «Le MTC n’a rien à craindre du PMU, nous venons en amis»
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Aymeric Verlet: «Le MTC n’a rien à craindre du PMU, nous venons en amis»
Est-ce pour compenser le déclin des paris hippiques en France que le Pari mutuel urbain (PMU) se fait globe-trotter ?
Non, c’est parce que les courses françaises plaisent énormément à l’étranger. Les enjeux collectés à l’international sont en forte croissance. On peut, aujourd’hui, parier sur les courses françaises dans 50 pays (NdlR, dont un tiers en Afrique) à travers le monde.
Comment expliquez-vous cet engouement ?
Il y a plusieurs raisons. La première, c’est la qualité des courses françaises, avec un nombre de chevaux intéressant pour les parieurs. Notre deuxième atout, c’est le volume des enjeux : 9 milliards d’euros par an (NdlR, environ Rs 360 milliards), ce qui permet de redistribuer des gains importants en France et à l’étranger. Il y a aussi l’impact d’Equidia, notre chaîne de télé qui diffuse les courses en direct dans le monde entier, et qui est très appréciée des parieurs.
Concrètement, combien pèsent les paris réalisés à l’étranger ?
Pour la première fois en 2016, le seuil d’un milliard d’euros a été dépassé, notamment en Afrique. Ce continent est pour nous un vrai axe de développement.
Comment cette «machine de guerre» fonctionne-t-elle ?
Le PMU est un GIE (NdlR, groupement d’intérêt économique). Nous dépendons des sociétés de courses France Galop et Le Trot, nos sociétés mères. Notre objectif est de financer les filières hippiques. La filière française, bien sûr, mais pas seulement.
Dans les autres pays, une contribution légale est perçue sur les enjeux. Elle est redistribuée aux filières hippiques locales, ce qui contribue à leur développement.
Mais vous vendez quoi à qui, concrètement ?
Le PMU commercialise le droit de parier sur les courses françaises pour le compte de ses sociétés mères. Nous fournissons à 65 opérateurs répartis dans le monde les images et les données des courses, qui permettent de prendre les paris. En contrepartie, on perçoit un commissionnement de ces opérateurs, qui correspond à la rémunération du service fourni.
Les données, c’est-à-dire ?
Le poids des jockeys, la couleur des casaques, les performances des chevaux… Il y a deux cas de figure : soit l’opérateur étranger fonctionne en «masse séparée», comme on dit dans le jargon, c’est-à-dire qu’il achète ces données et commercialise lui-même les paris hippiques. Soit il bénéficie de la «masse commune», et donc de toute la gamme de paris du PMU, dont le Quinté+. C’est le système mis en place à Maurice.
En clair, les mises des parieurs mauriciens s’agrègent à l’argent parié en France.
C’est ça. Nos systèmes informatiques sont connectés en direct et en toute transparence. Que vous jouiez à Paris ou à Port-Louis, les rapports sont identiques. Mais les enjeux et les gains sont bien plus attractifs qu’en masse séparée.
Maintenant que le décor est planté, qu’est-ce qui a motivé le choix de Maurice comme 50e partenaire ?
Les contacts ne datent pas d’hier. France Galop et le Mauritius Turf Club (MTC) ont des liens historiques forts. Depuis des années, nous rêvions de nous installer à Maurice. Quand Peerless a obtenu sa licence pour de la masse commune sur les courses françaises, nous avons saisi l’opportunité, via notre filiale, PMU Partenaires.
PMU Partenaires, Peerless, Integrity Sports, on s’y perd un peu. Qui fait quoi ?
PMU Partenaires est une société de service. Sa mission est de développer le pari en masse commune, en particulier en Afrique. Elle fournit l’outil informatique et l’accompagnement marketing nécessaire, entre autres. Peerless, pour faire simple, est la société détentrice de la licence PMU à Maurice. C’est elle qui commercialise nos paris. Et son distributeur est Integrity Sports.
Et Lee Shim, il fait quoi ?
Qui ? Je ne connais pas ce monsieur. Notre interlocuteur est M. Cassam Dhunny, le directeur de Peerless. C’est lui qui a signé le contrat avec PMU Partenaires.
Le PMU vante un partenariat gagnant-gagnant, mais des acteurs locaux ont des doutes…
Il faut savoir que la Gambling Regulatory Authority perçoit une commission de 3 % sur les enjeux en masse commune. J’ignore si cet argent sera directement reversé au MTC, mais je sais qu’il bénéficiera à la filière hippique mauricienne dans son ensemble, en finançant, notamment, la lutte antidopage.
Pour nous, c’est important que le MTC, avec qui nous avons une longue amitié, puisse se développer. Nous allons l’aider à bénéficier d’une partie de cette nouvelle manne. Celle que produira, du moins je l’espère, la prise de paris sur les courses françaises.
Dites-vous cela pour calmer le jeu ?
Je dis cela parce que c’est du concret : PMU Partenaires et le MTC sont actuellement en pourparlers. De notre côté, depuis Paris, nous allons tout faire pour que les courses mauriciennes se hissent au niveau des standards internationaux, afin de pouvoir les proposer en France et dans d’autres pays.
Un député mauricien estime que cette histoire sent mauvais…
Mauvais ? Tout le monde y gagne !
«Tout cela pue la corruption», a-t-il dit à l’Assemblée nationale…
C’est complétement faux et c’est mal nous connaître. Le PMU, en tant que financeur de la filière hippique française, est sous la double tutelle des ministères du Budget et de l’Agriculture. Les contrôles internes et externes sont pointus et nombreux. Tous nos contrats commerciaux sont passés à la loupe par l’État.
Nous vérifions évidemment la fiabilité de nos interlocuteurs étrangers et c’est le cas de Peerless. Le PMU est le premier opérateur de paris hippiques mutuels en Europe et le troisième au monde, on ne peut pas faire n’importe quoi avec n’importe qui.
Mon analyse, c’est que l’arrivée à Maurice de la masse commune sur les courses françaises a créé beaucoup d’émois. D’autres opérateurs étaient sur les rangs, ça a créé de la déception et des polémiques. C’est assez classique.
Comptez-vous élargir le cercle de vos partenaires ?
Nous ne fermons la porte à personne, bien au contraire. Notre volonté est de travailler avec un maximum d’opérateurs sur Maurice, en partenariat avec Peerless. C’est dans l’intérêt de nos deux filières, surtout face à la concurrence des paris sportifs, qui grignotent de plus en plus de part de marché.
«Pour nous, c’est important que le MTC, avec qui nous avons une longue amitié, puisse se développer.»
Pour résister, il faut développer les paris hippiques. Plus les enjeux seront élevés, plus les gains le seront. Donc, nous voulons que d’autres opérateurs puissent proposer les courses françaises. Aujourd’hui, évidemment, nous travaillons avec le détenteur de la licence. Mais rien n’est figé, j’espère que nous passerons des accords avec d’autres totes, parce que c’est notre intérêt commun.
Un mot sur le démarrage de l’activité…
Il est conforme à nos attentes. Petit à petit, nous allons développer la notoriété des courses françaises, main dans la main avec le MTC.
«Mon analyse, c’est que l’arrivée à Maurice de la masse commune sur les courses françaises a créé beaucoup d’émois. D’autres opérateurs étaient sur les rangs, ça a créé de la déception et des polémiques. C’est assez classique.»
On sent que vous faites des efforts pour rassurez cette institution, qui elle, vous craint…
La principale inquiétude que j’ai entendue est logique : les courses françaises ont lieu le week-end, en même temps que celles du MTC. Donc, je comprends leur crainte. Ce qu’il faut voir, c’est que la concurrence profite à l’ensemble du secteur. Les parieurs du PMU ont le choix entre 9 000 courses françaises et 4 000 courses étrangères par an.
Pourquoi autant ? Parce que la multiplicité de l’offre augmente l’intérêt du parieur. Une course toute les demi-heures n’intéresse pas les parieurs, en France on en propose tous les quarts d’heure. Les joueurs se déplacent plus facilement dans les points de vente, cela multiplie les volumes d’enjeux et le chiffre d’affaire.
La logique du «cash machine» ?
Le cash machine, c’est une course toutes les cinq minutes, ce n’est pas notre objectif. Pour en revenir aux craintes du MTC, j’aimerais être rassurant : il n’y aura pas de concurrence frontale. À nous de travailler ensemble pour proposer une offre harmonieuse.
Cela veut dire quoi ?
Qu’il y a un équilibre à trouver entre les courses mauriciennes et françaises proposées aux parieurs.
Pas de concurrence frontale, vraiment ?
Non, parce qu’une course locale présentera toujours plus d’attraits qu’une course étrangère. Cette règle se vérifie dans les cinquante pays où nous sommes présents. En France, on a quatre fois plus d’enjeux sur les courses françaises. C’est normal, la connaissance du parieur est plus forte. Le MTC n’a rien à craindre, nous venons en amis.
Sinon, vous avez fait quoi à Mediapart ?
Rien. On ne les connaît pas….
Eux ont l’air de vous connaître. Un blog de ce site d’investigation accuse les dirigeants du PMU d’accepter «l’argent sale de mafias étrangères»… C’est de la calomnie pure et simple.
Avez-vous porté plainte ?
S’il fallait porter plainte à chaque fois qu’un blog nous attaque… Encore une fois, tous nos contrats commerciaux sont scrutés de près et soumis à l’approbation d’un certains nombres d’organismes d’État. Ils contiennent deux pages relatives à la lutte contre le blanchiment. Ce sont des sujets sensibles, sur lesquels nous sommes extrêmement vigilants. Nous avons donc des contrôles très poussés. Je ne sais pas si un autre opérateur de paris dans le monde est autant contrôlé que le PMU.
Ce qui n’empêche pas des manquements...
Des manquements ?
Une enquête de la Cour des comptes publiée l’an dernier pointe «l’action insuffisante du PMU» pour prévenir les activités frauduleuses ou criminelles.
La Cour des comptes est dans son rôle en suggérant des améliorations. Elle n’accorde jamais de blanc-seing aux opérateurs qu’elle contrôle.
Quels sont vos objectifs à Maurice en termes de chiffre d’affaires ?
Ils sont ambitieux… mais pas communicables à ce stade.
Pourquoi ?
Parce que nous ne sommes pas seuls dans cette aventure, nous avons des partenaires. Ce ne serait pas correct de parler à leur place.
la gamme des paris proposés va-t-elle s’étoffer ?
Oui. Les nouveaux jeux que nous sortirons en France seront disponibles au fur et à mesure à Maurice ; c’est l’avantage de la masse commune. Vous découvrirez bientôt notre dernière nouveauté, le Super 4. C’est un jeu qui s’adresse aux parieurs avertis, il devrait plaire aux Mauriciens.
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