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Maladie mentale: l’espoir renaît grâce à Friends in Hope
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Maladie mentale: l’espoir renaît grâce à Friends in Hope

L’affable Joyce Marie Jeanne, la présidente du comité exécutif de Friends in Hope, qui, rappelons-le, est l’unique organisation non gouvernementale (ONG) à Maurice à encadrer les personnes souffrant de maladies mentales, rayonne dans cette grande demeure qui s’étend sur un terrain de 42 perches et que l’organisation loue de Caroline Philogène, une Mauricienne qui fait la navette entre Maurice et l’étranger. Ce contentement est également apparent chez Neetysha Sawoky, la manager, chez H Rangasamy, le responsable de la thérapie et chez Irène Bancilhon, la trésorière qui les a rejoints. À les écouter, le lieu n’a que des bénéfices. «La maison de Bonne-Terre était devenue petite pour nous car nous avons des projets à développer et il nous fallait chercher un nouvel espace», confie Joyce Marie Jeanne. «Ici, c’est spacieux, tranquille et la cour offre de nombreuses possibilités de jardinage. De plus, vu la localisation de la maison, c’est plus accessible.»
Avant l’aménagement de Friends in Hope, cette maison était occupée par le club Alpha qui se consacre au bridge. Désormais, cette maison sera beaucoup plus animée avec les adhérents fréquentant l’ONG. «Vu l’espace dont nous disposons, nous pourrons appliquer certaines thérapies en plein air et même pratiquer des sports comme le badminton, faire du jardinage, planter notamment des fines herbes pour des pots d’épices et des plantes d’appartement que nous pourrons vendre. Je pense aussi à une vente régulière de gâteaux car la cuisine est grande. Cela tombe bien car une de nos adhérentes suit actuellement un cours de décoration alimentaire. Comme la cour est remplie d’arbres fruitiers, lorsque nous aurons des fruits de saison, nous pourrons préparer des compotes et des achards. Sans compter qu’ici, on peut lancer d’autres cours d’artisanat», explique la présidente du comité exécutif.
La piscine de Beau-Bassin n’étant pas trop loin, elle va aussi encourager ses adhérents à en profiter. Mais l’ONG ne compte rien imposer car sa politique est de toujours consulter ses adhérents et parents et d’évaluer au préalable leur motivation par rapport aux activités proposées.
Friends in Hope a vu le jour en 1997 sur l’insistance des parents d’enfants souffrant de maladies mentales qui réclamaient un centre de jour pour la prise en charge de leurs enfants. Lorsque l’on parle de maladies mentales, il s’agit de personnes souffrant de troubles bipolaires (maniacodépressifs), des schizophrènes et celles ayant des troubles obsessionnels compulsifs. L’objectif de Friends in Hope est non seulement de soutenir les malades et leurs parents et contribuer à réhabiliter les malades pour qu’ils atteignent un maximum d’autonomie, mais aussi de faire progresser la compréhension vis-à-vis de ces maladies et participer à l’amélioration des cadres légaux, administratifs et sociaux pour les affaires les concernant.
Depuis sa création, Friends in Hope a encadré 258 adhérents, leur offrant du lundi au vendredi des activités thérapeutiques, des ateliers de créativité, comprenant de l’art, de la musique, du chant, de la lecture, du théâtre, de la relaxation, de même que des ateliers de jardinage et de cuisine. «À chaque Noël, nous faisons des bûches, des décorations, des cartes de souhaits et des bougies, entre autres, que nous vendons.»
Lorsqu’un adhérent se présente pour la première fois à l’ONG, il est soumis à une évaluation pour connaître son état précis et planifier avec lui les activités qu’il voudrait exercer. Ce dernier est suivi de près par l’équipe thérapeutique qui fait des évaluations régulièrement et un bilan de chaque adhérent à la fin de chaque trimestre.
L’important, explique Harry Rangasamy, est que les adhérents n’arrêtent pas leurs médicaments. «Les malades doivent être suivis par un médecin et stabilisés avant d’arriver ici. Et une fois qu’ils y sont, ils doivent continuer la prise de médicaments. L’important, c’est l’amélioration de leur qualité de vie.»
Parmi les 258 adhérents admis depuis l’an 2000, 29 ont pu être totalement stabilisés au point d’être employés à plein-temps par des compagnies. «Certains d’entre eux ont pris de l’emploi dans des firmes privées de renom en tant que réceptionnistes et clercs de bureaux. Un en particulier travaille à la libraire solidaire de l’organisation, Au Bonheur des Livres, qui se trouve à London Plaza, à Vacoas. D’ailleurs, certains stagiaires vont aussi à la librairie pour aider pour les braderies qui sont organisées en fin de mois. Quatre ont fait des études supérieures à Maurice et à l’étranger et parmi eux, un étudie la linguistique et l’autre la comptabilité. Trois autres adhérents ont suivi un cours à temps plein auprès de la Mauritius Employers Federation. Vu notre prise en charge thérapeutique faite par un personnel hautement qualifié, très peu sont réadmis à l’hôpital Brown Sequard», déclare Joyce Marie Jeanne.
Mais pour pouvoir proposer tout cela aux adhérents, Joyce Marie Jeanne et son équipe font des «miracles» car le grant-in-aid gouvernemental annuel n’est que de… Rs 100 000 alors que leur budget de fonctionnement annuel est de Rs 4,5 millions. «Plus de la moitié de ce budget va à nos 13 salariés, tous qualifiés pour encadrer les personnes souffrant de maladies mentales. Nous sommes obligés de nous débrouiller comme nous le pouvons. Les parents paient une cotisation annuelle de Rs 300 par an que nous serons obligés d’augmenter à Rs 600 l’an prochain. Chaque adhérent qui est en mesure de payer verse Rs 400 mensuellement et lorsqu’il passe au niveau de stagiaire et qu’il devient plus autonome, il ne paie que Rs 100 et on lui verse une petite allocation. Nous devons compter alors sur notre Flag Day annuel et la générosité de particuliers et nos levées de fonds. Nous dépendons aussi du soutien CSR des firmes privées que nous remercions pour pouvoir réaliser nos projets. Sauf que le programme du CSR est surtout axé sur l’allégement de la pauvreté et nous sommes pénalisés car ce n’est qu’une infime partie des fonds qui est allouée aux associations s’occupant de santé. Ce n’est pas évident, mais nous devons être inventifs. Espérons que la mairie de Beau-Bassin–Rose-Hill nous aidera.»
La maladie mentale est toujours un tabou à Maurice, même si l’ONG anime régulièrement des causeries sur les maladies mentales dans les centres communautaires de l’île. Il y a trois ans, Friends in Hope a ouvert un centre dans le Nord pour prendre en charge les personnes souffrant de maladies mentales qui habitent la région. «Nous avions 20 bénévoles là- bas. Au bout de deux ans, nous n’avions que deux adhérents. Si bien que nous avons dû fermer le centre. Il y a encore des parents qui hésitent à sortir leur enfant qui souffre d’une maladie mentale. Or, les personnes souffrant de maladies mentales sont intelligentes et font des merveilles en artisanat et dans bien d’autres ateliers de créativité pour peu qu’elles soient bien encadrées. Nous allons continuer notre travail de sensibilisation.»
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